« Singapour, un État obligé d’aller seul », (par Alfousseni Sidibé)

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Singapour est un pays composé en grande partie d’immigrants venus de Chine et d’Inde, contraints de bâtir une vie nouvelle sur une petite île sans ressources naturelles. En août 1965, Lee Kuan Yew, âgé de 42 ans, se retrouve à la tête d’un pays d’à peine 2 millions d’habitants pour une superficie de 640 km² (64 000 hectares).

Singapour avait rejoint la Fédération de Malaisie en 1963. Mais à la suite de désaccords politiques profonds avec le gouvernement fédéral, l’île est contrainte de quitter la fédération le 9 août 1965 et de devenir indépendante.

Pour Lee Kuan Yew, Singapour n’était qu’une zone créée par les Britanniques pour servir de port et d’entrepôt maritime. Le pays héritait donc d’une île sans arrière-pays, « un cœur sans corps ». Les prévisions étrangères étaient pessimistes : le Sunday Times, dans son édition du 22 août 1965, écrivait que « l’économie de Singapour s’effondrerait si les bases britanniques, qui coûtaient plus de 100 millions de livres sterling, venaient à fermer ».

Lee lui-même reconnaissait : « Je partageais ces craintes, mais je ne pouvais pas les exprimer. Mon devoir était de donner de l’espoir au peuple, non de le démoraliser. »

À la séparation d’avec la Malaisie, Singapour ne disposait que de deux bataillons, commandés de surcroît par un brigadier malais.

Les trois priorités de Lee Kuan Yew

À l’indépendance, Lee Kuan Yew identifia trois priorités pressantes pour assurer la survie de Singapour :

La reconnaissance internationale du pays

La première étape était d’obtenir l’adhésion de Singapour aux Nations Unies. Pour mener cette mission, Lee choisit Sinnathamby Rajaratnam, ancien étudiant à Londres et militant anticolonialiste reconnu. Rajaratnam possédait une solide expérience diplomatique et savait concilier les principes avec les compromis nécessaires aux relations internationales. Apprécié autant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, il incarnait la crédibilité dont Singapour avait besoin sur la scène mondiale.

La défense et la sécurité nationale

Singapour devait assurer sa survie face aux menaces extérieures. Lee confia cette mission à Goh Keng Swee, chargé de mettre en place un véritable outil de défense avant le retrait total des troupes britanniques prévu en 1971. À cette époque, l’île ne disposait que de deux bataillons, commandés par un brigadier malais, ce qui rendait le pays extrêmement vulnérable à une éventuelle agression de ses voisins.

La relance de l’économie

Le troisième défi était de redonner vie à l’économie nationale. Les ports de Singapour, autrefois florissants, commençaient à être délaissés par les pays voisins, et le taux de chômage atteignait 14 %. Lee et son équipe durent inventer de nouvelles stratégies pour redynamiser l’activité économique. Leur pari était audacieux : trouver des solutions inédites, capables de rendre Singapour plus compétitive que ses voisins.

Un choix décisif : mobiliser le peuple

Après avoir dressé la liste des défis et mesuré les options limitées, Lee conclut que Singapour ne pourrait pas survivre avec des solutions ordinaires. Il fallait mobiliser la population autour d’une ambition commune : accomplir des choses extraordinaires, rester unis et produire mieux, à un coût plus faible que les concurrents régionaux, dont l’objectif était de détrôner Singapour de son rôle de hub maritime.

Lee soulignait que la plus grande richesse du pays n’était ni les ressources naturelles (qu’il n’avait pas), ni la taille de son territoire, mais la confiance du peuple. Cette confiance, gagnée lors des luttes contre les communistes et les ultras malais, ne devait pas être gaspillée par la corruption ou une mauvaise gouvernance.

La deuxième ressource essentielle, selon lui, était le peuple singapourien lui-même : travailleur, économe et avide d’apprendre. Malgré les tensions raciales, Lee était convaincu qu’avec une politique juste et équitable, Singapour pouvait vivre en harmonie – à condition notamment que les opportunités économiques soient partagées équitablement entre toutes les communautés. 

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Alfouseni Sidibé

source: https://lydmali.com/oblige-daller-seul/

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