(CROISSANCE AFRIQUE)-Au Mali, la production industrielle du métal précieux a connu une chute significative, notamment un recul de 32% sur un an, pour atteindre seulement 26,2 tonnes fin août, selon des informations fournies par un document officiel du ministère des Mines, qui a été examiné par l’agence de presse Reuters.
Ainsi, ce chiffre de production est en net déclin, non seulement par rapport aux 38,5 tonnes qui avaient été extraites pendant la même période de l’année précédente, en 2023, mais il reste également marqué par un déficit notable de 22,5% par rapport aux prévisions officielles qui s’élevaient à 33,8 tonnes. Cette baisse préoccupante s’explique principalement par l’arrêt prolongé des opérations de Barrick Mining, un acteur essentiel et pilier incontournable de l’industrie aurifère locale au Mali.
Le Mali, bien qu’étant le troisième producteur d’or de tout le continent africain, après des géants comme l’Afrique du Sud et le Ghana, dépend fortement de cette ressource précieuse, le métal jaune représentant en effet près de 70% de ses recettes d’exportation. L’arrêt des activités à Loulo-Gounkoto, le complexe aurifère phare de Barrick Mining, a ainsi provoqué une véritable onde de choc au sein de ce secteur crucial, perturbant l’équilibre établi.
En 2024, cette mine avait produit 578 000 onces, soit environ 16,4 tonnes d’or, mais elle est malheureusement restée fermée de janvier à juillet. Cette fermeture prolongée est la conséquence d’un bras de fer compliqué entre le gouvernement de transition du Mali et la société canadienne Barrick Mining, en raison de désaccords concernant des taxes impayées et les dispositions du nouveau code minier, ajoutant une couche de complexité à une situation déjà tendue.
L’impact des circonstances actuelles est tellement significatif que l’objectif annuel ambitieux de 54,7 tonnes fixé par Bamako semble dorénavant hors de portée et inatteignable. Un responsable bien informé du ministère des Mines a, sous le sceau de l’anonymat, révélé à Reuters que »tout cela est dû aux problèmes de Barrick. » Ces conflits persistants avec les multinationales ne sont pas récents et ont des racines profondes.
En fait, la production industrielle d’or du pays avait déjà enregistré une chute dramatique de 23% en 2024, soulignant une tendance inquiétante. Le gouvernement du Mali, comme beaucoup d’autres régimes de la région ouest-africaine, adopte une stratégie de nationalisme des ressources naturelles. Cette approche vise à revendiquer une plus grande part des bénéfices générés par l’exploitation minière, mais elle a des conséquences sur le climat d’investissement. En effet, elle refroidit les investisseurs occidentaux, qui deviennent de plus en plus réticents, tout en ouvrant grand la porte aux intérêts russes qui voient une opportunité d’élargir leur influence.
Depuis la reprise des activités en juillet dernier, les mines de Loulo-Gounkoto fonctionnent à un rythme faible, plafonnant à seulement 25% de leur capacité réelle. Cette situation est due à un manque critique de pièces de rechange vitales et à un redémarrage incomplet des installations nécessaires au bon fonctionnement des opérations. Barrick Gold Corporation, une des sociétés minières majeures impliquées, estime que le retour à un rythme de production normalisé et optimal nécessitera encore au moins quatre mois de réajustement et d’efforts intensifs.
En raison de l’incertitude et de la situation actuelle chaotique, la société a déjà pris la décision de retirer la mine de ses plans de prévisions mondiales pour l’année 2025. Pendant ce temps, Bamako continue d’espérer et de tabler sur une contribution potentielle de 17,5 tonnes qui viendrait alimenter la production nationale, bien que cet objectif semble de plus en plus difficile à atteindre compte tenu des circonstances présentes.
Au-delà de Barrick, qui est l’un des acteurs majeurs dans l’exploitation minière, d’autres entreprises de renom telles que B2Gold, Resolute Mining, Allied Gold et Endeavour Mining jouent également un rôle conséquent dans l’exploitation des riches gisements aurifères du Mali. Cependant, la volatilité de la réglementation actuelle, accompagnée par les tensions politiques et les défis sécuritaires persistants, pèse lourdement sur leurs perspectives d’investissement à long terme. Pour l’État malien, la diminution de la production minière augmente considérablement la pression pour générer des recettes fiscales suffisantes et obtenir des devises étrangères, surtout dans un contexte où le pays est déjà affaibli par une instabilité politique chronique.
Pour ces grandes entreprises minières, l’incertitude liée à l’application des contrats et la forte dépendance aux arbitrages du gouvernement militaire rendent difficile toute planification stratégique à long terme. À court terme, bien que le Mali continue d’être fortement dépendant de l’or pour son développement économique, cette fragilité économique actuelle met en exergue l’urgence pour le pays de diversifier ses sources de revenus et de rétablir un climat de confiance solide et durable avec les investisseurs étrangers potentiels.
Korotoumou Sylla