(CROISSANCE AFRIQUE)-Au Ghana, la devise nationale, connue sous le nom de cedi, traverse une période de turbulence économique qui pourrait encore s’aggraver dans les mois à venir. Une analyse approfondie de la situation économique actuelle, menée par Barclays Plc, souligne que le cedi est susceptible de continuer à se déprécier face au dollar américain.
Cette tendance inquiétante est principalement causée par l’assouplissement monétaire mis en œuvre par la Banque du Ghana, ainsi que par les incertitudes budgétaires persistantes alors que le programme initié par le Fonds monétaire international s’approche de sa conclusion. Ces éléments combinés créent une dynamique économique difficile que le pays devra naviguer.
Depuis la fin juin, on observe une dépréciation significative du cedi, qui a perdu environ 15% de sa valeur par rapport au dollar, une évolution préoccupante, représentant un taux d’échange d’environ 12,145 pour un dollar américain. Cette chute spectaculaire place le cedi comme la deuxième monnaie la plus affaiblie au monde durant cette période, juste après le peso argentin, un autre exemple de devise touchée par des facteurs économiques externes et internes.
Cette tendance baissière continue est alimentée non seulement par la forte demande saisonnière en dollars des importateurs, qui accentue la pression sur la monnaie locale, mais aussi par les choix de politique monétaire du gouvernement ghanéen, qui cherchent à stimuler l’économie mais risquent d’accroître le déséquilibre entre l’offre et la demande de devises. Les enjeux sont élevés et les solutions complexes, nécessitant une gestion judicieuse pour éviter une crise économique plus profonde.
En juillet, la Banque du Ghana a pris la décision de réduire drastiquement son taux directeur de 300 points de base, pour le ramener à un niveau historique de 25%. Cet assouplissement sans précédent laisse entendre qu’il pourrait bien se prolonger dans les mois à venir si l’inflation continue de ralentir de manière significative. En effet, on a observé en août une hausse des prix limitée à 11,5%, représentant ainsi le taux d’inflation le plus bas enregistré depuis près de quatre ans sur le territoire. Dans ce contexte, le scénario d’une nouvelle réduction des taux d’intérêt lors de la réunion prévue pour le 17 septembre semble plus que jamais crédible et pourrait offrir des opportunités intéressantes pour stimuler davantage l’économie.
Par ailleurs, Barclays, l’une des banques internationales notables, a révisé ses anticipations concernant le taux de change du cedi. Elle estime désormais qu’il pourrait atteindre 13,5 pour un dollar d’ici la fin de 2025, ce qui représente un ajustement à la hausse par rapport à sa prévision initiale de 12. Pour appuyer ce changement de perspective, les analystes avancent plusieurs raisons, notamment le risque accru d’une réapparition de dérapages budgétaires à l’approche de la conclusion du programme actuel du Fonds Monétaire International. Ce phénomène pourrait être exacerbé par un nouvel assouplissement décisif de la politique monétaire, susceptible d’influencer de manière importante le marché financier de la région.
Le Ghana, qui est reconnu comme le premier producteur d’or d’Afrique, a bénéficié d’une relative discipline budgétaire notable depuis l’ascension au pouvoir de John Mahama en janvier 2025. Cette rigueur dans la gestion des finances publiques se traduit par une diminution significative du déficit budgétaire, qui est passé de 2% du PIB un an auparavant à 0,7% au cours du premier semestre de cette année.
Cependant, un rapport de Barclays avertit que les efforts réalisés jusqu’à présent pourraient être menacés à l’approche de la fin du programme d’assistance du Fonds Monétaire International (FMI), prévu pour se terminer en mai 2026. Une augmentation des dépenses publiques à ce moment-là pourrait entraîner une pression accrue sur la monnaie nationale, le cedi, et compliquer encore davantage le retour à une stabilité économique durable pour le pays.
Notons que la capitale, Accra, se trouve donc confrontée à deux défis majeurs. D’une part, il est crucial de maintenir l’inflation sous contrôle par le biais d’une politique monétaire flexible, qui permet de soutenir la croissance économique continue. D’autre part, il est essentiel de conserver une discipline budgétaire rigoureuse, ce qui rassurerait les investisseurs et limiterait les fluctuations de la devise nationale. Dans les mois à venir, l’évolution du cedi sera un test déterminant de la capacité du Ghana à équilibrer ces exigences contradictoires, tout en favorisant un environnement économique stable et prospère pour ses citoyens.
Abdoulaye KONÉ