MALI–RUSSIE : Bamako choisit Moscou, et le dit sans trembler

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(CROISSANCE AFRIQUE)-Alors que les équilibres mondiaux vacillent, Bamako fait un pas décisif vers l’Est. En se rendant à Moscou, le Président Assimi Goïta affirme une vision claire : celle d’un Mali maître de ses choix, fidèle à sa souveraineté, et déterminé à dialoguer d’égal à égal dans un nouvel ordre international.


Il est 21 h 2, samedi soir à Bamako, lorsque les moteurs d’un avion long-courrier affrété par la Fédération de Russie s’éveillent sur le tarmac de l’aéroport international Modibo Keïta-Sénou. À bord, un Chef d’État vêtu de blanc, silhouette impassible, et dans ses bagages diplomatiques : une idée du Mali, de sa souveraineté, et de l’ordre du monde tel qu’il entend désormais le négocier. Le Général Assimi Goïta quitte Bamako pour Moscou. Il ne s’envole pas seulement vers une visite officielle. Il trace une trajectoire.

Un choix assumé

Car cette fois, il ne s’agit pas d’un simple déplacement présidentiel rythmé par des sourires convenus et des communiqués interchangeables. Non. Ce voyage-là est porteur d’un message explicite : le Mali fait le choix stratégique de diversifier ses partenariats, et il le fait à ciel ouvert, à bord d’un appareil russe spécialement affrété — un symbole que la diplomatie aime parce qu’il dit sans parler.

À Moscou, Vladimir Poutine a déployé le protocole des grandes occasions : accueil par les plus hauts responsables, présence remarquée d’ambassadeurs africains, programme diplomatique dense. On ne reçoit pas un président malien tous les jours avec cette solennité. Mais au-delà des poignées de main, ce sont des intérêts profonds qui se croisent et s’alignent : celui d’un Mali en quête d’autonomie, et celui d’une Russie désireuse de rebattre les cartes de l’influence en Afrique.

L’Afrique, précisément. Celle que l’on convoque souvent dans les discours, mais qu’on écoute rarement dans les stratégies. Celle qui, depuis des décennies, a trop souvent été le terrain d’expérimentations politiques et sécuritaires imposées de l’extérieur. Or, voici que l’un de ses États décide, en pleine transition politique, de regarder vers l’Est, non par provocation, mais par conviction. Cela s’appelle un choix. Et ce choix, le Mali l’assume.

Le monde ne se conjugue plus au singulier

La coopération sécuritaire avec Moscou cristallise l’inquiétude de certaines capitales occidentales. On murmure « dérive », on agite « ingérence », on soupçonne « opacité ». Mais que ceux qui brandissent aujourd’hui la morale se souviennent d’hier. Des décennies de tutelle militaire, d’aides conditionnées, de conseils non sollicités. Le Mali ne rompt pas avec ses partenaires traditionnels. Il les rappelle simplement à la modestie.

Et puis il y a l’or. Symbole ultime d’une Afrique qui s’épuise à exporter sa richesse brute. Avec l’appui d’une société russe, le Mali lance une raffinerie industrielle à Bamako, détenue majoritairement par l’État malien. Un projet lourd, stratégique, structurant. Qui, au passage, contredit l’image d’un pays sous influence. Le Mali choisit, investit, et structure sa vision. Il ne suit pas, il trace.

Cette visite officielle, pourtant, ne se résume pas à une alliance de circonstance. Elle s’inscrit dans une logique de rééquilibrage du monde, où les anciennes puissances ne sont plus seules à distribuer les cartes. Elle dit quelque chose d’un moment global où le Sud global, jadis regardé avec condescendance, commence à parler d’égal à égal. Non pas par caprice idéologique, mais parce que le monde ne se conjugue plus au singulier.

À ceux qui s’interrogent sur le sens de ce rapprochement russo-malien, il faut répondre sans détour : le Mali ne cherche pas un tuteur, il cherche un partenaire. Et s’il regarde vers Moscou, c’est parce qu’il y voit une écoute, une méthode, et un respect que d’autres ont parfois oublié. Le Mali ne s’aligne pas, il s’amarre à ceux qui respectent sa souveraineté.

Assimi Goïta, en se rendant à Moscou, n’a pas simplement répondu à une invitation. Il a pris position. Dans un monde qui tangue, le choix de ses alliés vaut déclaration de doctrine. La sienne semble désormais claire : le Mali se tient debout, et s’adresse à ceux qui ne le regardent pas de haut.

Envoyé spécial depuis Moscou

croissanceafrik
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Croissance Afrique (sarl) est un Média multi-support qui propose plusieurs rubriques axées sur l’actualité économique du continent. Le magazine est un journal (en ligne dont un mensuel disponible dans les kiosques à journaux) qui traite spécialement les informations financières dédiées à l’Afrique. Il est également le premier média malien spécialisé dans la production d’Informations Économiques, financières, Stratégiques, et orienté vers le reste du monde. Le Magazine a été fondé en Novembre 2017 à Bamako.

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