(CROISSANCE AFRIQUE)-La Biennale artistique et culturelle du Mali est un outil de brassage culturel, social et générationnel. Elle offre une plateforme essentielle où se rencontrent différentes cultures du Mali. Grâce à sa capacité à rassembler et à créer des ponts, la Biennale joue un rôle crucial dans la promotion de la compréhension et de la tolérance dans le Mali d’aujourd’hui.
Pour Issouf Koné, journaliste culturel à Kone’xion culture, le concept de brassage, dans le cadre d’une manifestation comme la biennale, représente bien plus qu’un simple rassemblement. C’est un pouvoir qui permet de réunir les multiples et diverses régions du Mali, tout en intégrant les différentes aires culturelles qui enrichissent le pays. Ce n’est pas seulement une question de célébration collective, mais une occasion où toutes ces régions se regroupent pour fêter ensemble la diversité, mettant en avant le Mali comme un héritage commun. « C’est cet aspect de communion et de partage qui confère à la biennale le statut d’un levier puissant pour promouvoir l’inclusion sociale et la coexistence harmonieuse », dit-il.
Pour lui, « la biennale peut et doit s’adapter aux réalités contemporaines en intégrant, par exemple, les technologies numériques actuelles pour répondre aux besoins modernes et offrir une accessibilité accrue. Prenons cette année, par exemple, où la biennale est prévue à Tombouctou. Tout le monde, malheureusement, n’aura pas les ressources financières nécessaires pour s’y rendre physiquement. Donc, pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer, il est indispensable d’utiliser le digital pour garantir l’inclusion et la participation de toute la nation.
Il est crucial de redoubler d’efforts pour assurer que la biennale touche un maximum de personnes et qu’elle reste à la hauteur de sa réputation et de son engagement ». Alfousseïni Konaté, artiste photographe, estime que la biennale est l’une des activités culturelles les plus significatives qui jouent un rôle crucial dans le brassage culturel et l’inclusion sociale. « La biennale favorise les échanges culturels, l’assimilation des coutumes locales et enrichit la diversité sociale ». Pour lui, la photographie incarne la liberté, et là où il y a la liberté, il y a aussi la paix et la bienveillance ; des valeurs essentielles pour une société harmonieuse ».
Ayant participé à la biennale de Mopti en 2023, Alfousseïni déplore l’absence de d’expositions photographiquesde cet événement. Il exprime le souhait que les organisateurs intègrent davantage de telles expositions dans les programmes futurs de la biennale. La biennaleoffre un cadre de rencontres où se tissent de nouveaux liens entre les participants, favorisant ainsi l’intégration sociale et la cohésion. Tapa Guindo, diplômé de l’Institut National des Arts (INA), souligne que la biennale représente un instrument essentiel et puissant pour combattre l’exclusion sociale. « Elle crée des espaces d’expression et de dialogue ouverts, tout en encourageant une participation inclusive pour les groupes marginalisés. De plus, elle accroît la visibilité des artistes talentueux issus de ces communautés, offrant ainsi l’opportunité de débats significatifs sur les enjeux complexes liés à l’exclusion sociale ».
« Cependant, son efficacité ne peut se révéler qu’à travers une organisation bien pensée, une attention minutieuse et la création de partenariats solides et durables dans les domaines aussi variés que l’éducation, le sport, la danse et les jeux », ajoute Tapa Guindo. « C’est en regardant avec fierté les personnes s’approprier avec passion des pratiques artistiques telles que la photographie, la danse ou encore la musique, et en devenant elles-mêmes des acteurs autonomes et innovants, que la satisfaction atteint son paroxysme », souligne-t-il. La biennale, un événement phare pour Kadiatou Kanté, artiste chanteuse, se révèle être un puissant outil de brassage culturel. Pour elle, cet événement représente bien plus qu’une simple exposition de talents ; c’est avant tout un espace privilégié d’échange et de partage. Elle se remémore une occasion mémorable où elle a été inspirée par un plasticien rencontré lors d’une biennale, soulignant ainsi l’importance de ces rencontres artistiques et humaines.
Mohamed Guindo, sociologue, ajoute que chaque communauté ou groupe ethnique du Mali est susceptible de nourrir quelques préjugés ou idées préconçues à l’égard des autres. « Cependant, le brassage culturel joue un rôle essentiel en tant que levier puissant pour dissiper ces préjugés et transformer les perceptions erronées en compréhension mutuelle ». Pour lui, le brassage social « est un processus d’interaction et de connexion entre les diverses cultures, un échange qui permet de dévoiler et d’apprécier les significations profondes des actions et des expressions culturelles de chacun ». De ce point de vue, l’insertion sociale, ou socialisation, se présente comme une forme d’adaptation sociale précieuse lors de grands événements tels que la biennale, où il devient possible de faire saisir à l’autre la signification cachée et souvent enrichissante de sa culture propre.
Issouf Koné explique qu’il est essentiel de mettre en place des stratégies efficaces pour réussir à capter l’attention des publics qui ne fréquentent pas les lieux culturels. Mohamed Guindo souligne aussi que des événements culturels de grande envergure, tels que la biennale, jouent un rôle fondamental dans la diffusion et la mise en valeur des différentes cultures par le biais du rapprochement de nombreux acteurs de chaque culture. De cette manière, affirme-t-il, lorsque la culture d’un groupe est comprise et appréciée par d’autres, cela favorise l’insertion et réduit les risques d’exclusion. De plus, pour atteindre et émouvoir les publics les plus éloignés, ceux qui n’ont pas l’habitude de participer à ce type d’événements, il faut mettre en place un mouvement social permettant de cultiver les populations au vivre ensemble et à l’acceptation des cultures différentes.
Kadidia Doumbia
Ce reportage est publié avec le soutien de Journalistes pour les Droits Humains (JDH) et NED au Mali.