« C’est peut être le dernier jour de la vie. C’est peut être le dernier coucher du soleil que je verrais » ai je pensé.
Il est 18h environ, je rentre à la maison, je regarde, je fixe l’arbre qui est dans la cour, avant que la nuit ne tombe. J’essaie de graver cette image dans ma tête pour qu’au cas où je verrai la mort certaine, que ce soit la dernière image.
Les arbres, les feuilles vertes m’ont toujours apaisé. C’est d’ailleurs pour cela que la première association que j’ai créée dans ma vie est SOS Nature en février 1990, un an avant l’AEEM. SOS Naure dont la stratégie était justement de créer des cellules de crise qui furent adoptées par l’AEEM quasiment avec les mêmes acteurs aux commandes qu’à SOS Nature dont Issa Mariko à l’ENA à l’époque et succéda à Oumar Mariko comme secrétaire général du Bureau de Coordination de l’AEEM en 1991, Mamadou Coulibaly du comité AEEM du Lycée Askia, tous deux membres fondateurs de SOS Nature et membres du Bureau de Coordination de crise qui a dirigé l’AEEM à partir du 20 mars jusqu’au 26 mars.
La fin d’après midi du 21 mars restera gravé dans ma mémoire comme un moment d’humilité intense.
« Demain il faudra y aller, être au devant, être au fidèle au poste, assumer la mission qui m’a été confiée, l’assumer au mieux de mes capacités pour être digne de la confiance des camarades, pour être digne de mon sang. »
« Après tout n’avais je pas publiquement proposé et combattu pour cette stratégie depuis toujours ?
N’avais pas écrit, sans que personne ne me le demande et soumis aux camarades, le document officiel détaillant la stratégie dont j’étais chargé maintenant de coordonner l’application à la tête du Bureau de Coordination de Crise ? »
Je crois à notre victoire, depuis des mois je le clamais haut et fort, on me traitait de fou, « Moussa va te tuer », je m’en fichais.
J’en ai la certitude quasi divine de la victoire dès le 19 mars, dès l’instant où j’ai été élu président du bureau de coordination de crise chargé de diriger l’insurrection populaire et l’AEEM officieusement et officiellement jusqu’à la victoire ou la mort.
Mais la mort est toujours possible. C’est désormais plus qu’une réalité dont l’occurrence avait désormais une forte probabilité évidente.
« Si quelqu’un doit y laisser en premier, je suis le candidat ideal », je pensais.
Je m’en remets alors à Dieu et je comptais sur les arbres pour adoucir son appel, comme une ultime faveur, si ça devait arriver.
C’est arrivé pour beaucoup de camarades dès le 22, puis le 23,24,25 et après à cause des blessures dont beaucoup par balle.
J’ai toujours et dit que ceux qui ont survécu, ont survécu par chance ou par lâcheté. Je le pense encore.
Je rends hommages aux martyrs, à tous les camarades, et à tous les amis de SOS Nature.
Aimons la nature et protégeons nos arbres. L’arbre, c’est la vie.
Oser lutter, c’est oser vaincre. La lutte continue.
Vive le Mali Nouveau stable libre, fier et prospère
—
Aguibou Koné, candidat à l’élection présidentielle malienne en 2018, Président du Mouvement A Yèlè (Ouvrir).
Président fondateur de SOS Nature.
Président du Bureau de Coordination de Crise de l’AEEM pendant la révolution de mars 1991, membre de la commission adhoc AEEM – représentant du régime en février 1991.