Bamako le 16 octobre 2025
Harouna Niang – Ancien Ministre de l’Industrie, du Commerce et de la Promotion des Investissements du Mali
- Introduction : Contexte macroéconomique et importance du financement du secteur privé
Le secteur privé joue un rôle central dans l’économie malienne, représentant environ 60 à 65 % du PIB et 80 % des emplois. Cependant, la structure financière reste marquée par un faible taux de bancarisation (23–25 %), une concentration du crédit dans quelques grandes entreprises et une faible inclusion financière des PME et PMI. Dans ce contexte, le développement d’instruments de garantie solides est une condition stratégique pour stimuler l’investissement productif, soutenir la transformation économique et renforcer la souveraineté financière nationale. - Problématique de financement des PME/PMI au Mali.
L’accès des PME au financement bancaire reste particulièrement limité au Mali. Moins de 15 % des PME ont accès au crédit, contre 20 à 25 % dans certains pays performants de la sous-région. Le faible taux de bancarisation (23–25 %) traduit aussi la difficulté des entreprises à accéder au système financier formel. Les principaux obstacles sont : l’exigence de garanties réelles élevées, la courte durée des financements, les coûts élevés du crédit et une perception élevée du risque par les banques.- Rôle stratégique des fonds de garantie : expériences africaines
Les fonds de garantie sont des instruments de partage de risque entre l’État et les institutions financières. Ils permettent aux banques de financer davantage de PME, en couvrant une partie du risque de non-remboursement. Dans plusieurs pays africains, ces mécanismes ont montré leur efficacité :
- Maroc : Tamwilcom a multiplié par 5 les crédits aux PME entre 2000 et 2020.
- Côte d’Ivoire : FGPME a garanti plus de 1 500 PME depuis 2013.
- Ghana : GIRSAL a levé les obstacles au financement agricole grâce à une couverture partielle des risques.
- Situation actuelle et perspectives du FGSP au Mali
Le Fonds de Garantie pour le Secteur Privé (FGSP) est opérationnel au Mali, mais demeure faiblement capitalisé. Les volumes de garanties octroyés restent faibles par rapport aux besoins de financement. Sa notoriété auprès des banques et des PME est limitée. Son renforcement structurel et financier est donc indispensable. - Recommandations stratégiques pour faire du FGSP un levier économique majeur:
- Renforcer la capitalisation (objectif 100 à 150 Mds FCFA sur 5 ans).
- Développer des fonds sectoriels ciblés (agro-industrie, textile, numérique, énergie).
- Créer des synergies avec la CDC-Mali.
- Digitaliser et simplifier les procédures.
- Mettre en place une gouvernance crédible et multipartite. Les Chiffres clés de référence:
Taux de bancarisation
Mali : 23–25 %
UEMOA :32 %
Accès des PME au crédit
<15 %
20–25 % dans les pays performants
Capitalisation FGSP
Faible
Maroc : +10× initial sur 20 ans
Effet multiplicateur
×5 à ×10
Expériences Maroc / Ghana
Annexe – Sources et références
- BCEAO – Statistiques financières 2023–2024
- Doing Business / Banque mondiale
- BAD – Rapports sectoriels
- Ministère de l’Économie et des Finances (Mali) / DG Trésor, Budget 2024
- Tamwilcom (Maroc), FGPME (Côte d’Ivoire), GIRSAL (Ghana)
Synthèse des Recommandations stratégiques : Ouverture du capital pour augmenter les Fonds propres , intégration régionale et alliances assurantielles du FGSP
- Ouvrir le capital à la Diaspora, aux compagnies d’assurance, au CDC, à des institutions internationales de financement etc…
Le modèle recommandé est une gouvernance partagée et renforcée au plan professionnel. Ce qui va offrir plus de possibilités de lever des fonds privés, et une gestion plus souple et crédible. Exemples : Tamwilcom (Maroc), Sotugar (Tunisie), BPI France, KfW (Allemagne), Japan Finance Corporation. - Intégration régionale AES et dimension stratégique transnationale
Le FGSP peut devenir un levier de l’intégration AES (Mali,Burkina Faso , Niger). Une plateforme régionale permettrait de mutualiser les risques et ressources, soutenir les projets transfrontaliers et renforcer la crédibilité internationale. Exemples : Fonds Européen de Garantie, FEI, plateformes latino-américaines.- Alliances stratégiques avec les assurances et la réassurance internationale
Les partenariats avec les compagnies d’assurance locales et internationales (co-garantie, réassurance via MIGA ou ATI) peuvent renforcer la capacité de couverture. Exemples : BPI France & Coface, Euler Hermes & KfW, MIGA, Kenya Development Guarantee Fund.
H. Niang
Ancien Ministre