(CROISSANCE AFRIQUE)- Au Mali, le long contentieux qui opposait depuis près de deux ans le gouvernement malien à la multinationale canadienne Barrick Mining semble, selon les dernières informations, entrer dans sa phase finale, marquant ainsi un tournant décisif dans cette affaire déjà complexe.
D’après plusieurs sources proches du dossier citées par Reuters, un juge malien a ordonné la restitution à Barrick de la possession de trois tonnes d’or, un précieux métal jaune qui avait été saisi en janvier dernier sur le complexe aurifère de Loulo-Gounkoto, un site qui est non seulement l’un des plus importants gisements d’or au monde, mais aussi un enjeu économique vital pour le pays. Ce stock d’or, d’une valeur estimée à environ 400 millions de dollars, était depuis près d’un an conservé dans les coffres de la banque BMS à Bamako, après avoir été intercepté par un hélicoptère militaire sur ordre judiciaire dans un contexte déjà tendu.
Bien que cette décision judiciaire marque un tournant majeur dans les relations entre les deux parties, la restitution de l’or reste toutefois encadrée par certaines conditions. En effet, il incombera à Barrick de prendre en charge l’organisation du transfert physique de l’or, matérialisant ainsi la sortie du précieux métal des coffres de la banque. Cette étape, bien que logistique, symbolise néanmoins la normalisation progressive des relations entre le groupe minier et les autorités de transition maliennes, qui tentent de restaurer un climat de confiance après une crise qui a engendré des tensions tant sur le plan économique que politique. Ce développement pourrait également ouvrir la voie à une collaboration plus étroite entre le gouvernement et les investisseurs étrangers dans le secteur minier, crucial pour le développement économique du Mali.
Ce dénouement tant attendu intervient dans le prolongement direct de l’accord crucial qui a été conclu à la fin novembre entre les deux parties prenantes, en l’occurrence l’État malien et la société minière internationale, mettant ainsi un terme définitif à un différend qui avait été déclenché par l’application du nouveau code minier malien. Ce code, introduit par un gouvernement dirigé par des militaires, se caractérise par des exigences plus strictes pour les opérateurs étrangers, engendrant une réaction significative de la part de Barrick, qui a été contraint de suspendre, dès janvier, l’ensemble de ses activités sur le site de Loulo-Gounkoto. Cette suspension a été suivie d’une escalade notable de la situation, culminant avec la décision de la justice malienne de placer le site sous administration provisoire en juin, ce qui représente une escalade sans précédent dans un pays où l’or demeure la première source de devises, essentielle à la stabilité économique nationale.
Selon plusieurs sources concordantes et bien informées, Barrick a finalement accepté un règlement financier d’environ 430 millions de dollars, soit près de 244 milliards de francs CFA, une somme considérable surtout dans un contexte où Bamako fait face à une pression sans précédent sur ses finances publiques, rendant nécessité et opportunité indissociables. En contrepartie de ce règlement, l’État malien s’est formellement engagé à abandonner l’ensemble des poursuites judiciaires qui visaient la compagnie ainsi que ses employés, tout en convenant de restituer le contrôle opérationnel du complexe minier. Cette mesure, très attendue depuis plusieurs semaines par les acteurs du secteur, marque un tournant significatif dans les relations entre l’État malien et les entreprises minières, annonçant une réconciliation potentiellement bénéfique pour toutes les parties impliquées.
Au-delà de l’aspect strictement judiciaire, cet accord récent traduit également un réalisme économique partagé qui semble s’imposer dans le dialogue entre les différentes parties prenantes. Pour Barrick, une entreprise mondialement reconnue dans le secteur minier, l’arrêt prolongé de l’exploitation des sites de Loulo-Gounkoto représentait un manque à gagner significatif et inquiétant sur l’un de ses actifs les plus rentables et stratégiques. Ce blocage n’affectait pas seulement les finances de l’entreprise, mais pouvait également avoir des répercussions sur l’emploi local et sur l’approvisionnement en ressources qui dépendent directement de la production aurifère. D’autre part, le Mali, un pays riche en ressources naturelles mais confronté à des besoins urgents de recettes fiscales dans un contexte sécuritaire de plus en plus précaire et d’un budget national déjà tendu, a rapidement compris que maintenir un conflit avec le premier producteur d’or du pays devenait coûteux et risqué. En effet, les tensions prolongées pourraient engendrer un climat d’incertitude économique qui dissuaderait d’autres investisseurs potentiels d’entrer sur le marché malien.
Notons qu’il reste désormais à observer si ce compromis atteint entre les différentes parties marquera un nouveau cadre de relations plus stables et durables entre l’État malien et les compagnies minières étrangères. Il est crucial dans ce contexte d’identifier comment ces interactions peuvent évoluer, notamment dans un pays où l’or n’est pas seulement un levier économique vital, apportant des bénéfices financiers importants, mais aussi un enjeu politique majeur, lié à la souveraineté des ressources naturelles et à la prospérité des communautés locales.
Daouda Bakary KONÉ

