Procès de l’avion présidentiel et des équipements militaires : quand la justice sonne le glat de l’impunité !

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(CROISSANCE AFRIQUE)- Au Mali, la Cour d’assises de Bamako, sous la présidence de Bamassa Sissoko, président de chambre à la Cour suprême du Mali, a clôturé l’un des procès les plus retentissants de l’histoire judiciaire malienne, celui de l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires.

Cette affaire a révélé un vaste réseau de malversations financières impliquant d’anciens ministres et de hauts responsables militaires. L’audience a été portée par le président Bamassa Sissoko. Il a été assisté de Bandiougou Fofana, Amadou Touré, Assaana Dolo et Zakariah Kanté tous conseillers à la Cour d’Appel de Bamako. La justice malienne vient de rendre ainsi un verdict historique du procès le plus long et qui était très suivi dans le pays et dans le reste du Monde, selon nos sources.

Les faits

Les faits portaient sur deux marchés attribués par l’État malien pour un montant total de 90,2 milliards FCFA : 69,18 milliards FCFA pour l’achat d’équipements militaires, 21,04 milliards FCFA pour l’acquisition de l’avion présidentiel. Plus de 30 milliards de FCFA restaient sans justification claire. Ce qui a conduit à des poursuites judiciaires engagées malgré plusieurs tentatives antérieures de classement sans suite.

Des figures de l’État sur le banc des accusés

Ce procès, inédit par son ampleur, a vu pour la première fois comparaître devant la justice deux officiers supérieurs de l’armée et deux anciens ministres. Parmi eux, Bouaré Fily Sissoko, ancienne ministre de l’Économie et des Finances, a joué un rôle central dans les irrégularités financières. L’affaire est également tristement célèbre pour avoir conduit à l’incarcération de Soumeylou Boubèye Maïga, ancien Premier ministre, décédé en détention.

Des juges courageux face aux pressions

L’ouverture de ce dossier doit beaucoup à la ténacité de plusieurs hauts magistrats, notamment M. Wafi Ougadeye Cissé (ex-président de la Cour suprême), Dr Fatoma Thera (actuel président), et Mamadou Timbo, procureur général. Malgré les pressions, ils ont maintenu les poursuites, là où deux précédentes tentatives avaient échoué. À l’inverse, les magistrats Cheick Mohamed Chérif Koné et Dramane Diarra, ayant dénoncé le caractère illégal de la procédure, ont été radiés de la magistrature.

Infractions relevées

Après plus d’un mois d’audience, les infractions suivantes ont été retenues : faux et usage de faux, atteinte aux biens publics, complicité d’atteinte aux biens publics.

Sanctions pénales
Après plusieurs mois de procédures judiciaires, le verdict du très attendu procès lié à l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires a été rendu ce 8 juillet 2025. L’ancienne ministre, Mme Bouaré Fily Sissoko a été condamnée à 10 ans de prison ferme, 500 000 FCFA d’amende. Quant à Nouhoum Dabitao, il écope 7 ans de réclusion criminelle et 300 000 FCFA d’amende. En revanche, Mahamadou Camara (ancien ministre) et le général Moustapha Drabo ont été acquittés. Les accusés en fuite, notamment Sidy Mohamed Kagnassy, Amadou Kouma, Nouhoum Kouma, Soumaïla Diaby, Moustapha Ben Barka ont écopé une réclusion criminelle à perpétuité.

Sanctions civiles

Plusieurs condamnations financières ont été prononcées : Bouaré Fily Sissoko et Moustapha Ben Barka : solidairement condamnés à rembourser 3,32 milliards FCFA, versés aux intermédiaires sans contrat dans le dossier de l’avion. Fily Sissoko, Amadou Kouma et Kagnassy doivent également 15 milliards FCFA pour des armes létales jamais livrées. Le nommé Nouhoum Dabitao et le fournisseur Guo Star doivent aussi 2 milliards FCFA pour du matériel non fourni. S’agissant du nommé Soumaïla Diaby, il a été condamné à payer 500 millions FCFA pour des frais de transit indûment perçus. Par conséqunt, tous les accusés sont condamnés à payer 10 milliards FCFA à titre de dommages et intérêts pour compenser les 25 milliards que l’État a versés à tort à Guo Star.

Détail des surfacturations

Le procès a aussi mis à jour des exemples flagrants de surfacturation : Gilets pare-balles : 650 000 FCFA l’unité (prix réel : 250 000 FCFA), véhicules : 120 millions FCFA (au lieu de 53 millions), paires de chaussettes : 30 000 FCFA (au lieu de 3 000 FCFA).

Le rôle controversé de Bouaré Fily Sissoko

Mme Fily Sissoko a reconnu avoir mis à disposition de feu Boubèye Maïga la somme de 15 milliards pour des armes, sans preuve de livraison. Elle a aussi accordé une garantie bancaire de 100 milliards FCFA à la Banque Atlantique, alors que le contrat ne nécessitait que 69 milliards, facilitant ainsi un faux administratif. Cependant, elle a regretté que cette somme ait été versée, affirmant qu’elle l’aurait défalquée si elle était restée au gouvernement lors du paiement des 25 milliards à Guo Star.

Une page noire de la gestion publique

Le témoignage de l’ex-Premier ministre Tatam Ly, qui dit avoir quitté précipitamment le gouvernement, a jeté une lumière supplémentaire sur la gravité de la situation. Il a dénoncé les pratiques opaques et son opposition à de telles dérives financières, affirmant même ne pas avoir été respecté par sa collègue Bouaré Fily Sissoko à cause de sa rigueur. Ce procès marque un tournant décisif dans la lutte contre la corruption au Mali. Malgré les sacrifices de certains magistrats, la justice a pu exposer les pratiques opaques qui gangrènent l’administration publique. La clarté du verdict témoigne de la volonté de redonner confiance à l’opinion dans l’appareil judiciaire malien. Pour une des rares fois où on a vu un président de la Cour Suprême de mener de main l’instruction de dossier criminel. Les hauts magistrats de la Cour Suprême, le Garde des sceaux et les autorités de la Transition ont été taxés de voiloir regler un compte politique avec le défunt Boubeye et Mme Bouaré. La preuve contraire a été apportée avec ce verdict.
Notons que le Ministre des finances, avec d’indemnités substantielles en contre partie, a l’obligation de surveillance et de bonne gestion des ressources publiques. Ce qui sonne le glat de la malversation financière en République du Mali par les magistrats hommes valeureux.

Nia Dialla KEITA

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Croissance Afrique (sarl) est un Média multi-support qui propose plusieurs rubriques axées sur l’actualité économique du continent. Le magazine est un journal (en ligne dont un mensuel disponible dans les kiosques à journaux) qui traite spécialement les informations financières dédiées à l’Afrique. Il est également le premier média malien spécialisé dans la production d’Informations Économiques, financières, Stratégiques, et orienté vers le reste du monde. Le Magazine a été fondé en Novembre 2017 à Bamako.

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