(CROISSANCE AFRIQUE)-Au Cameroun, la direction générale des douanes (DGD) a établi une projection ambitieuse pour les recettes douanières, qui atteindraient 1.144 milliards de FCFA (1,8 milliard USD) d’ici 2025. Cette prévision représente une augmentation notable de 4,5 % par rapport aux 1.094,6 milliards de FCFA (1,7 milliard USD) inscrits dans la loi de finances rectificative pour 2024.
Cette hausse anticipée des recettes témoigne non seulement d’un contexte économique dynamique, mais également de l’engagement de l’État camérounais à renforcer son infrastructure fiscale et ses politiques de contrôle à long terme. Pour réaliser cet objectif optimiste, la DGD se repose sur l’application rigoureuse de mesures stratégiques concernant l’exportation, notamment un taux de droit de sortie de 5 % sur les bois ouvrés, calculé sur la valeur Free on Board (FOB) de chaque essence.
En parallèle, l’administration douanière souhaite également capitaliser sur les taux d’imposition applicables aux logiciels importés, que ce soit par le biais de supports matériels ou de téléchargements numériques. Ces logiciels, qui sont classés dans la deuxième catégorie du Tarif extérieur commun (TEC), sont intéressants car leur taux standard s’élève à 10 %, mais ce chiffre double en cas de déclaration tardive, ce qui pourrait inciter à une plus grande conformité fiscale de la part des importateurs.
Cependant, même avec ces prévisions financières optimistes, le Document de programmation économique et budgétaire pour la période 2025-2027 émet quelques réserves quant à la viabilité de ces objectifs. Parmi les préoccupations majeures figure l’insuffisance des moyens logistiques dédiés au contrôle et à la surveillance, qui sont cruciaux pour la lutte contre les pratiques de fraude commerciale et de contrebande.
Cette situation est exacerbée par le rétrécissement des échanges formels avec le Nigéria et d’autres pays de l’Afrique de l’Ouest, dû à l’insécurité persistante dans les régions vulnérables du Cameroun, notamment l’Extrême-Nord ainsi que les zones Nord-Ouest et Sud-Ouest du pays. De plus, les risques associés à la mise en œuvre des Accords de partenariat économiques (APE) et la Zone de libre-échange continentale (Zlecaf) sont soulignés, car ces accords pourraient entraîner un resserrement de l’assiette fiscale, posant un défi significatif à la croissance des recettes douanières.
Un autre facteur qui aggrave cette complexité est la structure du commerce extérieur du Cameroun, qui s’avère de plus en plus tributaire d’une hausse des importations venues d’Asie. Ces marchandises, souvent à des valeurs inférieures comparativement aux produits similaires importés d’Amérique du Nord, ont également un impact sur la balance commerciale et soulèvent des questions sur la compétitivité des produits locaux.
Notons que face à ces défis, et afin d’augmenter la collecte des recettes douanières, qui représentent environ 15,6 % du budget national pour 2025, le gouvernement camerounais a introduit une série de mesures innovantes. Celles-ci incluent le renforcement de la sécurisation du processus de délivrance des déclarations d’importation, la mise en place d’une obligation pour les banques de rapporter mensuellement à l’administration des douanes, ainsi que l’habilitation de cette dernière à utiliser des technologies avancées pour contrer le blanchiment d’argent aux frontières.
De plus, un nouveau cadre législatif a été proposé pour pénaliser les transferts frauduleux de fonds à l’étranger, souvent justifiés par des achats de biens jamais réellement importés, ce qui contribue à assainir le secteur et à sécuriser les intérêts économiques du pays.
Moussa KONE