Docteur Ibrahim Haïdara, Promoteur du premier cabinet de psychologie au Mali, à Mali Émergent: « J’accorde une large partie de mon temps au cabinet, voire soulager les gens, les écouter » (interview)

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PAR JOURNAL MALI ÉMERGENT

Diplômé en 1992 de l’Université d’État de Saint-Pétersbourg (Russie) et en 2006 de l’Eberhard Karls-Unirsité de Tübingen (Allemagne), le Dr. Ibrahim HAÏDARA a la double qualification professionnelle de psychologue clinicien et d’Universitaire. Ayant cette double casquette de professionnel aguerri après avoir vécu pendant 30 ans en Europe, il a longtemps travaillé en France et en Allemagne. L’amour de son pays le pousse à regagner en mai 2017 son « chez-soi ».

Ayant le désir farouche de se soucier du bien-être des sociétés et des gens qui souffrent tout en les écoutant afin de trouver des solutions à leurs différents problèmes, à son arrivée au bercail, le Dr. HAÏDARA, a décidé d’ouvrir un Cabinet de psychologie malgré que le Mali soit un pays où le métier de psychologue est quasiment méconnu. Le Cabinet rencontre un public diversifié entre autre des patients qui viennent me voir parmi lesquels des enfants, des adolescents, des adultes et même des personnes âgées qui consultent pour divers motifs d’ordre familial, social, professionnel. On peut citer parmi les raisons de consultations les plus fréquentes : la consommation d’alcool ou de drogues, les actes de violence, les conflits intra-conjugaux et le manque de de confiance en soi. Pour en savoir plus sur la qualité de cet homme et du Cabinet PSY2A, veuillez lire l’intégralité de notre entretien qui s ‘est déroulé en son Cabinet.

Journaliste :

CROISSANCEAFRIQUE: Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Dr. Ibrahim HAÏDARA: Je suis le Docteur Ibrahim HAÏDARA, psychologue et promoteur de PSY2A, Cabinet de psychologie. Nous sommes situés à la frontière de la Cité du Niger dans le quartier de Niaréla-Sud. Le Cabinet existe depuis exactement trois (3) ans. En termes de rencontres avec le public,  il y a les patients qui viennent me voir, parmi lesquels des enfants, des jeunes, des adultes et des personnes âgées qui

consultent pour diverses problématiques : familiales, sociales, professionnelles, la consommation d’alcool ou de drogues, des actes de violence et aussi le manque de confiance en soi. Vraiment, on touche à tout au niveau du Cabinet.

Journaliste :

CROISSANCE AFRIQUE: Dans un pays comme le Mali d’où le métier de psychologie est moins connu comment vous en sortirez dans le métier de psychologie ?   

Dr. Ibrahim HAÏDARA

Dans nos traditions africaines, on n’est pas habitué à aller consulter un psychologue, voire un psychiatre. C’est quelque chose qui n’existait pas il y a moins de vingt ans. Il y avait quelques psychologues en Afrique francophone. Comme le monde évolue en permanence, les professions diversifient. Les problématiques qui touchent les questions sentimentales sont au centre de questionnements. Des spécialistes sur ce sujet se forment en conséquence.  

Les gens étaient habitués à consulter des charlatans ou des marabouts qui jouaient ce rôle de « psychologues ». Vu que la société est en profonde mutation, c’était à la famille ou aux amis qu’on allait raconter ses difficultés ou ses soucis. Malheureusement, la trahison a toujours été présente dans nos sociétés et le manque de confiance aux proches ou amis a tendance à s’accentuer. Finalement, les gens font le choix de venir vers les psychologues qui peuvent les écouter en toute impartialité. Le côté neutre du professionnel est là, de même que son professionnalisme est aussi reconnu. Les gens ont maintenant compris maintenant qu’il y a beaucoup d’arnaque chez certains marabouts ou charlatans et que tout ceci ne mène nulle part. Il est à souligner que ces marabout et charlatans recevaient à peu de frais, mais ne résolvent pas du tout leurs problèmes qui finissent par se compliquer au fil du temps. Donc, je pense que les psychologues ont vraiment la côte de nos jours. Le Cabinet PSY2A est aussi le 1er Cabinet de psychologie ouvert sous une licence d’exploitation. J’espère qu’il y en aura bien d’autres et que je puisse aussi avoir d’autres collègues qui viendront me rejoindre au

Cabinet. Je souhaite aussi former un jour de jeunes étudiants en psychologie pour qu’on puisse se consacrer à la société malienne qui rencontre de plus en plus de difficultés de nos jours.

Journaliste :

CROISSANCE AFRIQUE: On constate souvent que les étudiants après leurs formations universitaires sinon post-universitaires, veulent toujours rester dans le monde universitaire. Alors, pourquoi avez-vous choisi ce métier de psychologue et exercer dans un Cabinet de psychologie ?

Dr. Ibrahim HAÏDARA

C’est vrai que j’ai une double casquette de qualification universitaire. Je suis professeur et en même temps psychologue clinicien. C’est à dire, je dois travailler de façon directe avec les patients et je suis aussi emmené à enseigner ; donc donner des cours de psychologie. L’approche clinique qui est la prise de contact directe avec les patients est à mes yeux beaucoup plus efficace, plus sollicitée. C’est bien d’enseigner, mais quand les gens ont des problèmes il faut pouvoir les traiter, les soulager dans leurs souffrances. J’accorde une large partie de mon temps de travail au Cabinet pour soulager les gens, les écouter. Et parallèlement, je transmets mon savoir aux jeunes générations ou d’autres professionnels, même aux médecin qui peuvent avoir besoin de mes services, comme les infirmiers, les sages femmes, les aide-soignants, les éducateurs, les juristes. La psychologie est une discipline qui touche tous les domaines de la vie. Donc, on a énormément de travail à faire.

Journaliste :

CROISSANCE AFRIQUE: Vous avez vécu et longtemps travaillé hors du Mali où vous auriez pu encore mieux vivre et gagner votre vie. Qu’est ce qui vous a poussé à venir au Mali pour ouvrir votre Cabinet ?

Dr. Ibrahim HAÏDARA: Il y a des professions où on peut vite s’enrichir et il y a d’autres où on s’enrichit autrement. C’est à dire, quand je dis des professions où on s’enrichit vite, on gagne beaucoup d’argent et très vite. D’un autre côté, il y a d’autres professions où on gagne énormément sur

le plan humain. Et on ne peut choisir un tel métier et en même temps, vouloir gagner des millions ou des milliards en peu de temps. Donc, je pense qu’il faut être très vigilant et avoir une certaine conscience professionnelle. Je suis sûr et certain que les gens qui vont choisir ce métier, c’est plus qu’ils veulent gagner en termes de richesse humaine. J’aurais pu bien gagner ma vie, vu que j’ai vécu trente ans en Europe et travaillé en France en Allemagne. Je gagnais relativement bien ma vie là-bas et j’en étais heureux. Mais, il arrive un moment donné il faut faire d’autre choix. Donner à cet âge, c’est de se rendre utile dans un pays où il y a un manque cruel de certains professionnels. Il faut aussi pouvoir retrouver son chez-soi, parce que quand on retourne aux sources, à ses origines africaines, c’est tout un travail spirituel comme culturel qu’on gagne derrière. On a un certain confort ici en Afrique et qu’on n’a pas en Occident. La solitude pèse beaucoup en Occident. Et quand on a beaucoup de savoirs dans son travail ici, ça fait très plaisir. Gagner de l’argent, c’est bien mais il faut en être heureux à plusieurs niveaux. Donc, je me sens mieux ici, je suis pionnier dans le domaine et en termes de Cabinet même s’il y a quelques psychologues au Mali. Mais, avoir une telle formation pluridisciplinaire en psychologie comme la mienne, je peux dire que je suis assez gâté.

Journaliste

CROISSANCE AFRIQUE: Vous avez la casquette d’Enseignant d’Université et vous exercez en même temps le métier de psychologue praticien. Quels conseils donneriez-vous aux jeunes étudiants qui aimeraient exercer au futur ce métier?

Dr. Ibrahim HAÏDARA

Les jeunes générations doivent beaucoup travailler. Et cela est valable dans tous les domaines. On est dans un pays où l’éducation et l’enseignement universitaire est bafouée depuis plusieurs années. Je pourrais même dire plusieurs décennies. Il n’y a plus de formation universitaire adéquate au Mali, surtout dans le domaine de la psychologie qui reste une science méconnue. Je pense que ceux qui veulent choisir ce métier, doivent se doter de patience, de courage. Ils doivent beaucoup lire. Ils doivent découvrir

et observer les différentes personnalités qui sont dans nos sociétés. Donc, ils doivent être très courageux, très forts parce que c’est un travail assez pénible sur le plan moral. Les psychologues n’écoutent que des souffrances qui sont présentes depuis des années, voire des décennies. Des gens qui souffrent au fin fond d’eux mêmes. Il faut savoir les écouter, les accompagner et ne pas être émotionnel, ne pas se trouver faible, fragile devant des personnes qui sont vraiment dans des situations critiques. La formation universitaire c’est bien, mais la personnalité de tout un chacun doit aider à accomplir une mission qui n’est pas si simple que ça. Je dirais, que c’est comme un métier de chirurgien. Ce n’est pas facile de faire des opérations chirurgicales. il faut savoir être très prudent et très adroit en psychologie. C’est la même chose. Il faut aller vers l’information, chercher la source du problème et très vite dégager des solutions et faire des recommandations aux personnes qui nous consultent. Ce n’est pas facile de retenir des patients qui pensent que s’ils viennent nous voir une seule fois, que leur problème est résolu. Même si ceci peut rarement arriver. La thérapie demande beaucoup de temps, plusieurs mois de travail quand les souffrances sont enfouies au fin fond de l’individu.

 

 Entretien réalisé par Hamadoun Alphagalo

SOURCE: JOURNAL MALI ÉMERGENT

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Croissance Afrique (sarl) est un Média multi-support qui propose plusieurs rubriques axées sur l’actualité économique du continent. Le magazine est un journal (en ligne) qui traite spécialement les informations financières dédiées à l’Afrique. Il est également le premier média malien spécialisé dans la production d’Informations Économiques, financières, Stratégiques, et orienté vers le reste du monde. Le Magazine a été fondé en Novembre 2017 à Bamako.

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