Le Mali vit des sanctions de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) et de l’UEMOA (Union économique monétaire ouest africaine) depuis le 9 janvier 2022 suite à un sommet extraordinaire des chefs d’Etat desdites institutions dans la capitale ghanéenne (Accra). Ces sanctions sont entre autres, la fermeture des frontières terrestres et aériennes, le gel des avoirs de l’Etat au niveau de la BCEAO (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest, la suspension des transactions commerciales et financières. Face à cette situation, Abdoul Karim Diamouténé, économiste enseignant chercheur à la faculté des sciences économiques et de gestion de Bamako (FSEG) fait l’analyse cette situation sur l’économie malienne. Il faisait également partie de l’équipe des universitaires qui ont eu à travailler sur la situation et proposé des pistes de sortie de crise au gouvernement.
Selon le professeur Abdoul Karim Diamouténé, la création de la richesse dans un pays passe généralement par les entreprises. Au Mali moins de deux pourcent (-2%) des entreprises importent pour produire. Elles concernent exclusivement des secteurs stratégiques. Dans le cadre de cette analyse, ces entreprises sont scindées en deux groupes. Il s’agit des entreprises agricoles et celles non agricoles. On y trouve principalement les industries agroalimentaires, textiles, de la construction, du commerce, et des transports et télécommunication. Dans la survie de ces entreprises, le secteur public joue un rôle capital. Environ 21% des productions de de celles-ci dépendent de l’Etat. Par exemple, l’EDM-SA (Energie du Mali) qui leur fournit en énergie. Ces entreprises ne sont pas très importantes en nombre mais sont très capitales pour le développement économique du pays. La production des entreprises maliennes est vendue à l’intérieur du Mali à hauteur de 99%. Les principaux clients sont les particuliers et les ménages (49,4%), le secteur public (37%) et les échanges inter-entreprises (13%). Seul 1,3 % des entreprises ont exporté des produits. Avec le gel des avoirs de l’Etat et la réduction des recettes douanières, il serait obligé de réduire les dépenses. Ce qui pourrait porter un coup dur aux entreprises.
Pour lui, dans cette analyse, le secteur du commerce est le plus impacté par les sanctions à hauteur de 23% des entreprises dans le domaine. Dans notre pays, beaucoup de personnes vivent de ce secteur et une importante quantité des marchandises sont exportés via des voies terrestres des pays voisins comme le Sénégal et la Côte d’ivoire. Parce que notre pays ne dispose pas de port. Le secteur du transport des passagers est aussi très touché par ces mesures contre notre pays. A ce niveau d’autres facteurs en ligne comptent dans les mouvements des véhicules. Au niveau du secteur de la construction, le fer et le ciment constituent les deux éléments fondamentaux. Ceux-ci venaient principalement du Sénégal et de la Côte d’ivoire. Ces matériaux ont compris une augmentation de prix en cette période de crise. Il est aussi un secteur qui emploie beaucoup de personnes. Donc l’effet est systémiquement senti sur l’économie.
S’agissant maintenant des transferts de fonds, le secteur est beaucoup impacté par les mêmes sanctions. Le Mali est une nation de migration dont beaucoup de ses ressortissants vivent à l’extérieur notamment en France, en Côte d’ivoire. Cette couche de la population contribue beaucoup au PIB (produit intérieur brut) à coût de milliards par an. Toujours selon cette analyse, en 2020, cette diaspora a transféré dans le pays 987 millions de dollars, soit 5,6% du PIB. Selon les données de l’Enquête Modulaire Permanente 2017 (EMOP 2017), les pays de l’UEMOA constituent 67% des cas de transferts de fonds internationaux à destination du Mali. Ces fonds servent généralement au financement de la diversité des besoins des destinataires notamment les ménages. Selon les données de LSMS 2017, le financement des charges courantes des ménages (consommation, habillement, eau, dépenses, électricité …) constitue la principale composante (62%). En matière de santé (7%), d’éducation (2,25%) et d’appui aux travaux champêtres (8,22%).
Ibréhima Koné