Cette crise ne ressemble à aucune autre.» En annonçant hier une récession mondiale de 3% cette année, le Fonds monétaire international (FMI) a prévenu que cela pourrait être bien pire, tout en reconnaissant la difficulté de faire des prévisions économiques tant l’incertitude est «considérable». «Le monde a radicalement changé en trois mois (…).
Nous rencontrons une sombre réalité», a résumé Gita Gopinath, économiste en chef du FMI, dans le dernier rapport sur les perspectives économiques mondiales. «Il est très probable que cette année, l’économie mondiale connaîtra sa pire récession depuis la grande dépression» des années 1930 et dépassera celle de la crise financière mondiale, a-t-elle ajouté.
Le nouveau coronavirus est parti de Chine fin décembre avant de se répandre rapidement dans le monde entier. Hier, l’épidémie de Covid-19 avait fait près de 120 000 morts et presque 2 millions de personnes ont été diagnostiquées dans 193 pays et territoires depuis le début de l’épidémie, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles.
Dans un effort pour endiguer la pandémie, les gouvernements se sont résolus à confiner leurs populations, à fermer les commerces non essentiels, à réduire comme peau de chagrin le trafic aérien, paralysant des pans entiers de l’économie. En conséquence, le commerce international s’est effondré : le FMI prévoit ainsi une baisse de 11% du volume d’échange de biens et services en 2020. Alors que dans les crises économiques habituelles, les décideurs politiques s’efforcent de dynamiser aussi vite que possible l’activité économique en stimulant la demande, cette fois, «la crise est dans une large mesure la conséquence des mesures de confinement nécessaires», relève Gita Gopinath.
Pour les pays avancés, la récession devrait atteindre 6,1%. Aux Etats-Unis, où il y a peu de filet de sécurité sociale et où le système de santé est défaillant, la contraction du PIB devrait être de 5,9%. Dans la zone euro, le PIB va même dégringoler de 7,5%, avec des populations en Italie, en Espagne et en France durement affectées par le coronavirus.
Dans la zone Amérique latine et Caraïbes, la récession sera à peine moins marquée (-5,2%). Pour le Moyen-Orient et l’Asie centrale, le FMI table sur une baisse du PIB de 2,8%. La Chine et l’Inde devraient tirer leur épingle du jeu avec une croissance respective de 1,2% et de 1,9%. Le rebond de l’économie mondiale pourrait toutefois intervenir dès 2021, avec une croissance attendue de 5,8%, à condition que la pandémie soit effectivement maîtrisée au second semestre de cette année. Sinon, la récession pourrait être bien pire, une hypothèse «très probable», a mis en garde l’économiste en chef. «Malgré les circonstances désastreuses», il y a de nombreuses raisons d’être optimistes, a-t-elle opiné.
Dans les pays les plus affectés, le nombre de nouveaux cas diminue, après la mise en place de solides pratiques de distanciation sociale. La communauté scientifique travaille en outre à un «rythme sans précédent» pour trouver des traitements et des vaccins. Sur le plan économique, le FMI loue les mesures «rapides et substantielles» pour protéger les personnes et les entreprises les plus fragiles. En outre, poursuit Gita Gopinath, la différence cruciale avec la crise des années 1930 est l’existence d’institutions multilatérales, telles que le FMI et la Banque mondiale, capables de fournir une aide financière immédiate aux pays les plus vulnérables.
Des mesures budgétaires supplémentaires seront toutefois nécessaires si l’arrêt de l’activité devait persister et si le rebond économique s’avérait trop faible, une fois levées les mesures draconiennes de confinement.