(CROISSANCE AFRIQUE)-En 2024, la masse monétaire a franchi les 51 800 milliards FCFA, enregistrant une hausse de 8%, d’après les chiffres définitifs publiés par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) le 14 avril. Plus précisément, elle a atteint 51 810 milliards FCFA, soit près de 79 milliards d’euros, marquant une augmentation de 8,41% par rapport à 2023.
Mais que signifie réellement cette augmentation ? Quels en sont les moteurs, et comment ce chiffre reflète-t-il la vitalité économique, ainsi que les défis auxquels la région fait face ? Pour mieux comprendre, il est essentiel d’examiner ce qu’est la masse monétaire, un indicateur clé de l’activité économique.
La masse monétaire représente l’ensemble des moyens de paiement en circulation dans une économie, incluant principalement l’argent liquide (billets et pièces) et les dépôts bancaires, qui regroupent les sommes disponibles sur les comptes courants et d’épargne. Elle sert de thermomètre pour mesurer le dynamisme économique, car elle indique la quantité de liquidités en circulation parmi les ménages, les entreprises et les administrations.
En 2024, la circulation fiduciaire dans l’UEMOA a explosé de 17,2%, atteignant 12 509 milliards FCFA, ce qui témoigne d’une augmentation des transactions en espèces. Les dépôts bancaires, quant à eux, ont connu une hausse de 5,88%, atteignant 39 301 milliards FCFA, ce qui démontre une confiance persistante dans le système bancaire et un recours croissant aux services financiers formels.
Un autre facteur déterminant de cette évolution est la hausse significative des actifs extérieurs nets, qui représentent la différence entre les avoirs des institutions de l’UEMOA à l’étranger et leurs engagements envers le reste du monde. Ces actifs ont augmenté de plus de 320% en un an, s’élevant à 4 834 milliards FCFA, par rapport à 1 149 milliards FCFA en 2023. Cette forte dynamique s’explique principalement par le succès des levées de fonds réalisées par les États membres sur les marchés financiers internationaux. Par exemple, la Côte d’Ivoire a levé 2,8 milliards de dollars en eurobonds, tandis que le Bénin a mobilisé 750 millions de dollars. Ces opérations ont injecté des devises étrangères considérables dans l’économie régionale, renforçant ainsi la position extérieure nette de l’Union.
En outre, une autre composante clé de l’augmentation de la masse monétaire est la hausse des créances intérieures, qui correspondent aux prêts accordés par les banques aux États et au secteur privé. Ces créances ont progressé de 6,46% en 2024, atteignant 61 821 milliards FCFA. Plus spécifiquement, les créances sur les administrations publiques ont augmenté de 10,51%, illustrant une demande croissante de financement de la part des États pour combler leurs besoins budgétaires. Les crédits à l’économie ont, quant à eux, crû de manière plus modérée (+3,66%), signalant un soutien continu au secteur privé, dans un contexte où le crédit reste sélectif.
Bien que cette croissance de la masse monétaire indique un certain dynamisme économique, elle appelle à une vigilance constante. Une ample liquidité dans le système peut provoquer des tensions inflationnistes, particulièrement dans un environnement caractérisé par l’instabilité des prix des denrées alimentaires, des carburants et des matières premières.
Notons que la BCEAO devra s’efforcer de trouver un équilibre subtil entre la stimulation de l’économie à travers la liquidité et le maintien de la stabilité des prix, en ajustant les leviers de la politique monétaire tels que les taux directeurs et les réserves obligatoires.
Daouda Bakary KONÉ