Afrique de l’Ouest : la BIDC s’engage à réduire de manière significative le déficit d’infrastructures s’élevant à 100 milliards de dollars 

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(CROISSANCE AFRIQUE)-La Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO (BIDC) s’engage à réduire de manière significative le déficit d’infrastructures qui s’élève à astronomiquement 100 milliards de dollars en Afrique de l’Ouest. 

Au cours du webinaire qui s’est tenu le 12 août 2025, l’institution a mis en lumière la nécessité d’un réalignement stratégique du financement, en particulier dans le secteur des infrastructures qui constitue un pilier essentiel pour le développement économique et social de la région. La BIDC aspire à placer le capital privé, longtemps perçu comme un financement accessoire, au cœur de l’élaboration et de la mise en œuvre d’un ambitieux plan de développement qui se chiffre à plus de 100 milliards de dollars.

 Il s’agit non seulement de combler le manque criant d’infrastructures physiques telles que les routes, les ports et les réseaux électriques, mais aussi d’éliminer ce qui est devenu un obstacle majeur à la productivité, à la compétitivité économique et à l’intégration régionale. Le webinaire, intitulé « Financer le développement durable des infrastructures en mobilisant le secteur privé », a attiré un large éventail de participants, y compris des décideurs publics, des investisseurs institutionnels et des banquiers de développement. 

Au cours de cette rencontre, les experts ont échangé sur les étapes cruciales à franchir pour réaliser cette aspiration en transformant les idées conceptuelles en projets concrets, bancables et capables de résister aux défis économiques actuels et futurs.

Lors du lancement de la conférence, le Dr Brice Houeton, qui occupe le poste de Senior Executive Banking and Investment Corporate à la BIDC, a énuméré de manière détaillée les enjeux considérables auxquels le secteur est confronté. Cela se déroule dans un cadre marqué par une crise multidimensionnelle complexe, une forte et rapide croissance démographique, et des besoins pressants qui ont mis à l’épreuve et révélé les limites, voire les faiblesses, de la puissance publique en matière de financement des infrastructures durables nécessaires au développement économique et social. Le constat est sans équivoque : « S’appuyer uniquement sur l’État n’est plus viable. Il devient impératif, et même crucial, de s’assurer une mobilisation conjointe et proactive des acteurs publics, privés et multilatéraux pour répondre efficacement aux défis actuels. »

De son côté, l’ancienne ministre togolaise chargée du financement des infrastructures, Zouréatou Tchakondo-Kassa-Traoré, a mis en lumière un problème récurrent et préoccupant : le déficit structurel d’infrastructures au sein de la CEDEAO. Bien que le Ghana et la Côte d’Ivoire soient des exceptions notables, se classant parmi les quatre pays de la région à présenter un taux d’électrification aux alentours de 70%, il reste que la majorité des États membres affichent des taux bien inférieurs, souvent en dessous de 50%. 

Cette situation est d’autant plus alarmante qu’environ 50% des voies routières de la région ne sont ni aménagées ni revêtues, ce qui augmente considérablement le coût d’accès au marché pour les producteurs agricoles, entravant ainsi leur compétitivité.

«D’après les études, le déficit de financement des infrastructures de la CEDEAO se situe entre 50 et 100 milliards de dollars par an, ce qui représente une somme considérable à combler pour assurer le développement et la modernisation des infrastructures essentielles à la croissance économique et sociale de la région». 

Quand on sait que le continent africain a déboursé pas moins de 160 milliards de dollars pour assurer le service de la dette ces dernières années, on voit clairement que l’argent est présent dans le système, mais il s’agit de l’orienter et de le structurer de manière efficace pour répondre aux besoins pressants des infrastructures. L’implication directe et proactive du secteur privé devient alors indispensable pour combler ce gap financier et offrir des solutions innovantes et durables.

Les banques commerciales, souvent critiquées pour leur manque de vision à long terme, travaillent sur des ressources à court terme, incompatible avec les cycles d’investissement longs et coûteux des infrastructures. « Mobiliser l’épargne thésaurisée des ménages et des institutions pour la canaliser vers des instruments financiers de longue durée est un impératif absolu pour garantir des résultats pérennes. Les fonds de pension, avec leur capacité de placement à long terme, peuvent jouer un rôle décisif dans cette dynamique, à condition de procéder à un changement de paradigme dans leur stratégie d’investissement. »

Reprenant la parole dans cette discussion constructive, Dr Olagunju Ashimolowo, vice-président de la BIDC, confirme l’ampleur du gap de financement ouest-africain qui se creuse d’année en année. «Nous relevons de plus en plus de demandes en financement des infrastructures de la part des États membres, et, parallèlement, nous observons une disponibilité des fonds publics en constante diminution, ce qui nécessite une approche différente».

Participant à cet important webinaire, Kebba Faye, qui est actuellement le Directeur par intérim de l’Unité de préparation et de développement de projets au sein de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a exprimé avec emphase l’importance cruciale d’augmenter l’investissement domestique pour combler le déficit budgétaire qui s’élève à des milliards de dollars.

 Il a clairement exposé que ce défi financier majeur ne serait pas surmonté sans exploiter pleinement le potentiel des ressources locales, notamment à travers l’adoption de mécanismes de partage des risques bien élaborés : cela inclut la création d’une assurance régionale innovante, l’octroi de garanties publiques plus larges, ainsi que le développement de véhicules de financement mixte. 

Le banquier, avec une vision stratégique, plaide ainsi pour l’implémentation d’un mécanisme de garantie propre à la CEDEAO, pour apaiser les craintes des investisseurs face aux divers risques, qu’ils soient politiques ou opérationnels, qui peuvent survenir dans la région. Par ailleurs, Landry Ahouansou, qui occupe le poste de Directeur des Investissements chez STOA Infra & Energy, met un accent particulier sur la nécessité de renforcer la gouvernance : « Gouvernance, gouvernance, gouvernance », répète-t-il avec insistance. 

Selon lui, la confiance des investisseurs repose davantage sur l’historique impeccable de remboursement d’un État que sur l’existence de garanties financières excessives dans un pays mais avec un passé de défaillances financières. Une administration rigoureuse et transparente est donc essentielle pour inspirer confiance et attirer des capitaux essentiels pour le développement régional.

Lors d’une conférence internationale centrée sur le financement des infrastructures en Afrique, parmi les nombreuses solutions discutées se trouve l’idée novatrice de l’émission d’obligations d’infrastructure en monnaie locale. Cette approche vise principalement à mobiliser de manière efficace l’épargne domestique tout en limitant les risques associés aux fluctuations des taux de change. 

Fabrice Vossah, représentant de Vista Group, met particulièrement en avant l’accomplissement réalisé par l’UEMOA, soulignant que le fait de disposer d’une monnaie unique ainsi que d’un marché intégré englobant huit pays offre déjà un avantage comparatif indéniable. Selon lui, si la CEDEAO, qui représente une vaste communauté économique comprenant à l’origine 16 États, pouvait adopter ce modèle, l’effet de levier sur la bancabilité des projets d’infrastructure serait potentiellement immense et transformateur. 

Un tel marché élargi ne se contenterait pas seulement d’offrir des bassins de liquidité plus profonds, mais proposerait également une base d’investisseurs beaucoup plus diversifiée. De surcroît, cela créerait des portefeuilles de projets régionaux attirants, susceptibles de capter l’intérêt des capitaux privés à grande échelle, apportant ainsi des changements significatifs dans le domaine du financement du développement régional.

Le consensus sur la situation actuelle est partagé parmi les experts et acteurs économiques : l’Afrique de l’Ouest ne souffre pas d’un déficit d’épargne potentielle, mais plutôt d’un manque d’instruments efficaces pour mobiliser cette épargne de manière productive. En outre, la région ne manque pas d’une vision stratégique pour son développement.

 Cependant, ce qui fait défaut, ce sont des projets qui soient non seulement investissables mais également sécurisés et adossés à des cadres de gouvernance stables et robustes afin de garantir leur succès à long terme. Dans cette structure complexe et interconnectée, la Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO (BIDC) aspire à jouer un rôle essentiel en tant que catalyseur structurant du développement économique. Elle vise à aligner harmonieusement la volonté politique, les réformes réglementaires nécessaires et les innovations financières pour encourager les investissements. 

Concrètement, que ce soit par le biais des obligations d’infrastructure, la mobilisation des fonds de pension, l’établissement de mécanismes régionaux d’assurance ou les garanties offertes par la CEDEAO, l’objectif fixé est sans ambiguïté : il s’agit de déplacer définitivement et stratégiquement le capital privé de sa position périphérique actuelle aux commandes du financement des infrastructures essentielles en Afrique.

Daouda Bakary KONÉ 

croissanceafrik
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Croissance Afrique (sarl) est un Média multi-support qui propose plusieurs rubriques axées sur l’actualité économique du continent. Le magazine est un journal (en ligne dont un mensuel disponible dans les kiosques à journaux) qui traite spécialement les informations financières dédiées à l’Afrique. Il est également le premier média malien spécialisé dans la production d’Informations Économiques, financières, Stratégiques, et orienté vers le reste du monde. Le Magazine a été fondé en Novembre 2017 à Bamako.

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