(CROISSANCE AFRIQUE)-En quarante-deux ans, les aléas climatiques ont lourdement impacté l’agriculture camerounaise, entraînant des pertes économiques colossales estimées à environ 6 710 milliards de FCFA. Ce montant impressionnant représente plus de 24 % du produit intérieur brut (PIB) du pays, selon les chiffres de l’Observatoire national sur les changements climatiques (ONACC). Ces statistiques alarmantes ont été mentionnées dans l’exposé des motifs du projet de loi sur la production biologique, qui fait actuellement l’objet d’un examen attentif au Parlement.
Ces estimations couvrent la période allant de 1980 à 2022, et révèlent une situation critique. L’ONACC indique que ces pertes massives sont symptomatiques de la « vulnérabilité d’un secteur agricole encore largement tributaire des pluies et des saisons ». Il est essentiel de comprendre que cette dépendance souligne « la nécessité d’un changement profond dans les modes de production pour garantir la sécurité alimentaire nationale ». Avec des fondements fragiles, améliorer la résilience de l’agriculture du pays est d’une importance capitale.
En outre, selon le Plan national Climat, publié en 2024 par le ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable, il est attendu que les phénomènes climatiques extrêmes, tels que les sécheresses sévères et les inondations dévastatrices, connaîtront une intensification dramatique dans les décennies futures. Cette prévision, contenue dans le rapport, met en garde contre le potentiel accru de disruption et pourrait demander des stratégies d’adaptation robustes afin de mitiger les impacts sur le secteur agricole et au-delà…
Les zones les plus exposées sont décrites comme étant « les régions soudano-sahélienne, des hautes savanes guinéennes et des hauts plateaux de l’Ouest qui figurent parmi les plus exposées », précise encore le Plan. Cette observation souligne la vulnérabilité particulière de ces régions face aux changements climatiques et aux défis environnementaux associés. Les projections de la Banque mondiale datant de 2017, qui sont reprises et détaillées dans ce même document, confirment cette dégradation inquiétante.
En effet, les modélisations prédictives indiquent qu’entre les années 2040 et 2049, le risque de pertes agricoles augmentera significativement sur l’ensemble du territoire national. Dans l’hypothèse d’un scénario de faible réchauffement climatique, ces pertes agricoles pourraient s’élever entre 3% et 6% dans les régions septentrionales et occidentales du pays. Cependant, dans le cas d’un scénario plus alarmant de fort réchauffement, les pertes pourraient dramatiquement augmenter pour atteindre entre 12% et 18%.
Les régions du Nord et de l’Extrême-Nord apparaissent comme particulièrement menacées, car elles cumulent à la fois des « risques absolus élevés » et des pertes agricoles relatives qui dépassent la moyenne nationale, accentuant ainsi leur vulnérabilité économique. Face à cette inquiétante tendance, le gouvernement perçoit dans la production biologique une opportunité et un instrument stratégique d’adaptation et de durabilité pour l’agriculture nationale. L’exposé des motifs du projet de loi sur la production biologique.
La transition vers le biologique n’est pas seulement un changement bénéfique d’un point de vue écologique, elle revêt également une importance capitale sur le plan économique. Selon les rédacteurs du projet en question, cette transition pourrait offrir plusieurs avantages significatifs. Elle a le potentiel d’augmenter la résilience des exploitations agricoles face aux aléas climatiques et économiques en renforçant leur capacité d’adaptation aux changements.
De plus, elle permettrait de valoriser davantage les produits agricoles sur les marchés internationaux, où la demande pour des produits biologiques et durables ne cesse de croître. Par ailleurs, cette transition contribuerait à réduire les pertes post-récoltes, souvent importantes, grâce à une meilleure maîtrise des cycles de production et à l’amélioration des pratiques agricoles.
Notons que le Plan national Climat souligne également, de manière insistante, que l’absence de mesures d’adaptation aux nouvelles conditions climatiques et de gestion des risques de manière efficace pourrait gravement compromettre les efforts de réduction de la pauvreté dans les régions affectées, interrompant ainsi les progrès socio-économiques durement obtenus ces dernières années.
Mariam KONE

