(CROISSANCE AFRIQUE) -Au Mali, la Bourse des valeurs mobilières (BRVM) est une institution financière spécialisée assurant l’organisation et le développement du marché financier de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Depuis sa création, elle joue un rôle important dans la mobilisation de capitaux de long terme au profit des secteurs public et privé de nos pays.
Au regard de ces différents efforts et mission accomplies, nous avons décidé de donner notre micro à la directrice de l’antenne de la BRVM au Mali. Ainsi, Awa BAGAYOKO nous explique l’organisation de la bourse, le bilan 2023, les défis et perspectives, . Lisez plutôt.
« La BRVM compte aujourd’hui 46 sociétés cotées »
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Je suis Awa BAGAYOKO, Directrice de l’antenne de la Bourse des valeurs mobilières (BRVM) au Mali depuis près de 3 ans maintenant. C’est d’abord dans l’univers de l’investissement que j’ai fait mes premiers pas au Mali avant de me retrouver dans le marché financier, toujours soucieuse d’aider nos entreprises à avoir accès au financement. Aujourd’hui, je suis entièrement engagée pour que notre pays tire pleinement partie des opportunités offertes par notre marché financier.
« évoluer dans un écosystème organisé »
Quelles sont les missions de la BRVM ?
La Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) est la première expérience de bourse partagée par plusieurs pays dans le monde. Elle est considérée comme un succès d’intégration, à la fois politique, institutionnelle et technologique aussi. En effet, c’est une bourse complètement dématérialisée, sécurisée et transparente où se passent les négociations de valeur mobilières. La BRVM est certes un marché désintermédié, mais elle évolue dans un écosystème organisé, composé d’une autorité de régulation (AMF-UEMOA), d’un dépositaire central et banque de règlement, d’acteurs commerciaux, d’investisseurs et d’émetteurs etc., pour faire fonctionner le marché. Elle compte aujourd’hui 46 sociétés cotées. Elle a quatre missions principales :
- La cotation des valeurs mobilières : c’est là où se négocie les valeurs mobilières,
- L’animation du marché boursier :
- La diffusion de l’information boursière : qui dit investisseurs dit information financière
- La promotion du marché : faire connaître le marché de notre zone auprès des agents économiques qui ont un besoin de financement ou un excédent de financement. Cette promotion se fait à l’échelle du siège de la BRVM, mais aussi à l’échelle des 7 antennes dont dispose la BRVM dans les pays des Etats signataires.
« La BRVM est à plus de 10 Milles Milliards de capitalisation boursières, et en fin 2023, la BRVM s’est aussi hissée à la cinquième place des bourses africaines »
Quel bilan faites-vous sur les actions de la BRVM au Mali de l’année 2023
L’année 2023 a été une bonne année pour la BRVM, mais également pour les investisseurs dans l’ensemble. La BRVM a franchi le cap des 8 milles milliards de capitalisation sur le marché des actions. Ce qui constitue une belle avancée. Sur le marché des obligations, la BRVM est à plus de 10 Milles Milliards de capitalisation boursières, et en fin 2023, la BRVM s’est aussi hissée à la cinquième place des bourses africaines. C’est un bon point pour nous. Pour les investisseurs, le taux de rentabilité moyen sur le marché des actions est autour de 10% sur une période de 12 ans environ. Sur le marché des obligations, il est d’un peu plus de 6%, tandis que les taux créditeurs des banques sur les dépôts à terme ne dépassent pas 5%. La BRVM s’est donc clairement avérée être un placement performant à long terme.
Nos actions à la BRVM en 2023, ont aussi été de s’adapter à l’évolution du marché et de l’environnement des affaires. Il y a d’abord eu le lancement de nouveaux indices et de compartiments pour une meilleure lisibilité des investisseurs notamment. Puis la BRVM s’est engagée dans le développement de la finance durable au sein de notre union, dans ce cadre elle a signé un MoU avec la Bourse de Luxembourg, une référence en la matière.

Comment est organiser la BRVM ?
En termes d’organisation de la BRVM, on y trouve deux marchés : Le marché obligataire : étant le marché où se font les emprunts obligataires, les acteurs y vont pour financer des projets assez coûteux. Ce sont les Etats, les collectivités, les entreprises et institutions qu’on peut y trouver. Le marché des actions est un marché où on va trouver les entreprises qui sont désireuses de lever des capitaux à long terme.
Quelles sont vos problématiques vécues au niveau de vos activités
Il est impératif que le Mali soit plus présent sur le marché financier, pour cela, il faudrait déjà plus de sociétés cotées à la bourse. : à ce sujet-là, il y’a plusieurs contraintes a relevé au Mali : la méconnaissance de la BRVM encore à l’échelle de notre pays, les entreprises et les potentiels épargnants connaissent peu la BRVM malgré les actions de l’Antenne depuis maintenant 27 ans. Nous faisons beaucoup de sensibilisation, de formation auprès de ces différentes catégories pour développer la culture boursière. De manière générale au Mali, les entreprises sont de petites tailles (entreprises individuelles), par ailleurs, même celles qui réalisent de gros chiffres d’affaires (plus de 100 milliards, peuvent encore avoir un statut de SARL et souvent ne sont pas très transparentes en matière de déclaration financière. Il manque clairement une vision, une ambition de grandir et dépasser nos frontières. Or, pour aller à la bourse, il faut déjà avoir cette vision là et être constitué en Société Anonyme (SA).
« Offrir une continuité à une entreprise qui est dans cette situation »
On ne peut pas aller en bourse avec une SARL pour des questions de structure de la gouvernance et des considérations de conformité aux réglementations. Donc il y a ces problèmes-là : la petitesse des entreprises, le manque de transparence et de projection.
D’autre part, beaucoup de nos entreprises au Mali sont familiales. Elles pensent qu’ouvrir leur capital sur un marché financier, c’est perdre leur entreprise à jamais. Alors qu’il faut avoir une autre lecture : Ouvrir son capital sur le marché financier permet à ces entreprises d’avoir une meilleure gouvernance et de se pérenniser en assurant la postérité. Souvent, on rencontre des entreprises lorsque le patriarche à la tête de l’entreprise décède, l’entreprise s’éteint avec lui. La bourse permet justement d’offrir une continuité à une entreprise qui est dans cette situation.
Nous, à notre niveau nous poursuivons la sensibilisation : nous sensibilisons depuis les universités. Parce que, c’est eux les chefs d’entreprise de demain. C’est pour changer leur mentalité déjà face à la finance et au marché financier. Il y a aussi une grande responsabilité de l’Etat, en termes de développement de ce marché financier. Parce que l’Etat peut poser des actions déterminantes. Par exemple, en privatisant certaines entreprises dans lesquelles il a des participations. Vous savez, on ne demande pas à l’Etat de donner toutes ces parts à la population malienne, mais de permettre aux maliens de se sentir davantage concerné dans le développement de notre économie et de partager la richesse dans notre pays
Et il est important que les maliens puissent avoir des participations dans les sociétés au Mali et notamment les sociétés où l’Etat à quelques parts. : l’actionnariat populaire. Ou encore les émissions d’obligations[1] à destination de la diaspora, pour leur permettre à eux aussi de participer au financement du développement de leur pays et à la préparation de leurs vieux jours dans leur pays d’origine pour certains.
Pouvez-vous, nous parler, un peu de vos perceptives ?
En réalité, il faut plus d’entreprises à la cote BRVM. Nous travaillons à favoriser l’accès des PME au marché financier. En 2017, on a déjà créé un 3eme compartiment uniquement pour les PME, pour mieux s’adapter à leur réalité. D’ici à 2025 nous développerons également un marché obligataire pour les PME ou elles vont pouvoir avoir accès à des instruments comme les paniers obligataires(ce sont des paniers de petit emprunts obligataires) et des mini obligations (des petits montants d’emprunts obligataires) qu’elles pourront émettre pour se financer.
Nous travaillons également pour que les sorties des fonds d’investissement, du capital des entreprises dans lesquelles ils ont investi, se fassent par la bourse.
Le développement également de la demande de titre, faire en sorte qu’il y ait plus d’investisseurs sur le marché.
En termes de développement également de la demande de titre, c’est aussi susciter la réforme des retraites qui va permettre au fonds de pension d’acheter plus massivement des valeurs mobilières qu’elles ne le font aujourd’hui notamment les actions des sociétés.
En termes d’autres perspectives, c’est de favoriser la création de nouveau marché parce qu’aujourd’hui notre marché se concentre sur les marchés des obligations et actions. Nous aimerions développer d’autres marchés comme le marché des produits dérivés, des matières premières agricoles. Développer davantage la finance durable, c’est important, nous sommes dans une époque où la protection de l’environnement, la durabilité sont des questions importantes que la finance intègre aussi.
La BRVM Académie est aussi un autre projet, c’est de renforcer l’éducation financière et boursière des populations à travers une BRVM Académie qui va pouvoir donner les formations standardisées au grand public. Il y a plusieurs projets comme ça, nous ne nous arrêtons jamais.
Qui sont les partenaires de la BRVM au Mali ?
On peut dire que la BRVM a pour partenaire tout agent qui participe de prêt ou de loin au financement à long terme du secteur privé et public de nos pays.
Réalisée par Sira B Coulibaly