L’Intelligence Africaine en Afrique, un levier de développement ?

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LUNESCO sinvestit dans le domaine. Lengagement pour les organisateurs de ce forum est fort louable car il sagit dune innovation porteuse despoirs ; la promesse dune prospérité future. Au cours de lhistoire jalonnée de révolutions industrielles, malheureusement, léconomie précède systématiquement les politiques, le juridique, léthique Et le peuple !


Intelligence Artificielle Le mot IA suscite à la fois un véritable engouement teinté toutefois dune certaine appréhension. Il envahit le moindre recoin de notre espace, on en entend parler en longueur de journée et il risque de bouleverser notre mode de vie futur dans des domaines aussi variés que la santé, léducation, la culture ou lenvironnement. Et surtout, ces innovations technologiques seront des nouveaux facteurs de croissance économique comme lavait théorisé lautrichien Joseph Schumpeter au XIXème siècle. Comme rien nest parfait ici-bas, limmixtion de ces innovations provoqueront à terme non seulement la destruction demplois dans plusieurs secteurs dactivité mais également un chamboulement du mode dorganisation du travail et social. Un exemple parmi tant dautres pour les pays dAfrique qui ont surfé sur la délocalisation industrielle grâce à leur faible coût de main duvre. Est-ce-que les zones franches textiles ne pâtiront pas de larrivée de la robotisation des tâches introduites par lIA ? En regardant le verre à moitié plein, cette révolution technologique apportera également le progrès comme ses applications pratiques qui facilitent déjà la vie au quotidien : diagnostic en matière de santé, indicateur daridité des sols pour lirrigation, laccessibilité apprentissage dune langue – au savoir par le biais de son téléphone mobile.
Vers une cyber-colonisation de lAfrique ?
A propos de lIA, le président Vladimir Poutine, sous un air placide, a lâché une phase lourde de sens lors dune téléconférence suivi par des millions décoliers russes en 2017 : « le pays qui sera leader dans le domaine de lintelligence artificielle dominera le monde ». En Afrique, des initiatives colloques, centre de formation, allocation de subventions – foisonnent dans tous les sens. Force est de reconnaître quelles ne sont pas coordonnées à léchelle du continent. Prenons lexemple du Next Einstein Forum (NEF), lancé à Dakar par le président Macky Sall en 2016. Objectif : mettre les chercheurs au cur des solutions en matière dIA pour la transformation du continent. Lors de la seconde édition en mars 2018 à Kigali, seuls Paul Kagamé et son homologue sénégalais ont participé au NEF. Faut-il pour autant accabler nos dirigeants ? Si les acteurs institutionnels n’ont pas pris la mesure de la rupture technologique provoquée par l’IA, d’autres acteurs s’en saisissent. Pour preuve, la pléthore de colloques et de conférences organisées un peu partout en Afrique. Et surtout, l’arrivée depuis deux ans des GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple). Conscients de la formidable opportunité d’un marché en devenir et grâce à leur énorme moyen financier, Ils investissent essentiellement dans le domaine de l’IA et dans les véritables mines d’or que sont les datas center. En témoigne le projet « Equiano », initié par Google pour « capter » les entrées-sorties des données entre les États-Unis et l’Afrique à partir de 2020.
Cependant, les indicateurs continentaux dans le domaine de la recherche assènent une vérité crue quant à notre capacité panafricaine de riposte : seulement 0,5% du PIB est consacré à la recherche pour la grande majorité des pays ; au niveau mondial, les publications de recherche scientifique produites par lAfrique peinent à dépasser les 2%. Ne nous voilons pas la face, le continent a irrémédiablement pris du retard lors de lavènement des Nouvelles Technologies de lInformatique et de la Communication (NTIC) il y a maintenant 20 ans. Cet engouement actuel pour lIA nous rappelle furieusement les propos dithyrambiques emprunts despoir venant du continent mais aussi du monde entier : les NTIC, une chance pour lAfrique ! A lépoque, la pensée unique proférait que le continent avait raté la révolution industrielle mais cette fois-ci, il sera dans le bon wagon. On a enterré prématurément les cinq étapes de la croissance selon Walt Rostow avec les conditions préalables au décollage dune économie. Les experts de tout poil nous ont pondu des projections de +3 à 5% de croissance économique annuelle grâce aux NTIC. Sauf que les conditions de réalisation pour lappropriation des nouvelles technologies ne sont pas encore aujourdhui réunies. La progression continue du taux de pénétration du téléphone, une favorable réussite soit-dit en passant [source cabinet Deloitte : 336 millions en 2016 et 660 millions en 2020], cache mal la fracture numérique jamais comblée depuis plus deux décennies. Certes, le continent nest plus isolé du reste du monde : plusieurs backbones, ces réseaux de transmission par câble de fibre optique, sont maintenant opérationnels sur les côtes africaines et nous relient avec la planète. Reste à densifier le réseau national pour permettre à des millions dafricains daccéder à un internet à haut débit Et à un prix abordable ! Quel pays africain est capable aujourdhui de se lancer dans un chantier de maillage de tout son territoire pour une estimation globale denviron à 20.000 €uros par kilomètre de câble posé ?
Cette révolution numérique (encore une !) dite de l’Intelligence Artificielle ne repose-t-elle pas sur les NTIC ? Elle est au confluent de trois facteurs : le big data (une quantité de données produites par les utilisateurs), linformatique de très haute puissance pour transférer les données vers un hébergeur (le cloud) et lapprentissage de la machine cest-à-dire faire ingurgiter des millions de données aux ordinateurs pour pouvoir combiner toutes les probabilités. La condition sine-qua-non pour que cela se réalise demeure avant tout lélectrification stable au niveau dun pays ou une communauté de développement régionale.
Concrètement, lAfrique bénéficiera des milliers dapplications et autres solutions obtenues à partir des innovations de lIA avec des retombées significatives dans le domaine de la santé, léducation, lenvironnement. Mais lhémorragie ou plutôt la fuite de cerveaux et de jeunes talents ne cessera pas de sitôt. Quant à la souveraineté numérique ? Déjà, les géants du secteur de nationalité américaine, ces fameux Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, IBM (GAFAMI) et les chinois (Baidu, Huawai, Alibaba, Tencent, Xiaomi) surnommés BHATX imposent leur puissance technologique sur toute la planète. En Afrique, les premières tentatives ont fait long feu : rappelez-vous des projets loufoques de connexion internet par ballons dirigeables ou autres vecteurs (satellites à base altitude) ont été rangés dans les cartons de Google et Facebook. Microsoft investit discrètement et à long terme dans léducation en Afrique. Mark Zuckerberg, le propriétaire de Facebook a figé pour léternité un selfie en 2016 avec le président nigérian Muhammadu Buhari. Cétait lors de linauguration de son incubateur à Yaba, le quartier high-tech de Lagos (la Silicon Valley locale). La promesse de former 50.000 personnes dans le domaine numérique en contrepartie dun accès aux 30 millions dutilisateurs sur une population en devenir de 190 millions. La véritable richesse du futur au même titre, que les matières premières extractives actuelles, sera les données produites par les utilisateurs. Or, nous serions plus 2 milliards dafricains en 2050. Tel est lenjeu qui se joue sous nos yeux. Dans le domaine du numérique, lEurope et lAfrique sont tous les deux nommés des « suiveurs » ; ils se font imposer le modèle économique des GAFAMI et des BHATX.

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croissanceafrikhttps://croissanceafrique.com
Croissance Afrique (sarl) est un Média multi-support qui propose plusieurs rubriques axées sur l’actualité économique du continent. Le magazine est un journal (en ligne) qui traite spécialement les informations financières dédiées à l’Afrique. Il est également le premier média malien spécialisé dans la production d’Informations Économiques, financières, Stratégiques, et orienté vers le reste du monde. Le Magazine a été fondé en Novembre 2017 à Bamako.

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