Au Mali, le gouvernement a adopté le 21 août 2019 un projet d’ordonnance portant code minier. Cette révision, qui intervient à un moment où le prix de l’or semble avoir établi un nouveau plancher à 1500 dollars l’once, viserait à augmenter de manière substantielle la contribution du secteur minier à l’économie. Charles Bourgeois, avocat au barreau de Paris, spécialiste du droit minier et cofondateur du cabinet Bourgeois-Itzkovitch, détaille pour l’Agence Ecofin la nouvelle charte minière malienne.
Agence Ecofin : Pouvez-vous nous présenter les principales modifications apportées par ce texte présenté comme une réforme du code minier de 2012 ?
Charles Bourgeois : Il me paraît tout d’abord important de souligner que ce texte ne modifie pas en profondeur l’ancien code minier (Loi n°2012-015 du 27 février 2012, NDLR), mais apporte plutôt un certain nombre de correctifs destinés à permettre une meilleure contribution de l’industrie minière au développement économique du Mali.

« Toutes les parties prenantes sont conscientes de la nécessité d’augmenter la «part locale» des investissements miniers.»
Concernant l’attribution des titres miniers et la bonne gouvernance, l’une des modifications importantes portées par ce nouveau code minier est la suppression de l’autorisation de prospection et la modification de la durée de validité du permis de recherche et du permis d’exploitation de grande mine. La durée du permis de recherche passe ainsi d’une durée maximale (avec renouvellement) de 8 ans à 9 ans et le permis d’exploitation des grandes mines passe d’une durée initiale de 30 ans à 10 ans (renouvelable par période de 10 ans, jusqu’à épuisement des réserves).
Un autre apport important de ce texte porte également sur l’obligation de publier toutes les conventions minières conclues avec les opérateurs miniers sur le site internet du Ministère chargé des Mines et l’obligation pour tout titulaire de titre minier de se conformer aux principes et exigences de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), le Processus de Kimberley et la convention de Minamata sur l’utilisation du mercure.
« Un autre apport important de ce texte porte également sur l’obligation de publier toutes les conventions minières conclues avec les opérateurs miniers sur le site internet du Ministère chargé des Mines. »
Pour ce qui est du développement local et de la protection de l’environnement, à l’exemple d’autres pays de la sous-région comme le Burkina Faso, le nouveau code minier prévoit l’instauration d’un fonds minier de développement local, alimenté par une contribution de l’Etat à hauteur de 20% des redevances proportionnelles collectées, ainsi que par «les titulaires de titres miniers d’exploitation de mines […] à hauteur de 0,25% du chiffre d’affaires hors taxes au cours du mois ou de la valeur des produits extraits au cours du mois ».

« En matière d’environnement, un accent important est mis sur l’obligation de réhabilitation des sites miniers. »
En matière d’environnement, un accent important est mis sur l’obligation de réhabilitation des sites miniers. En témoigne, par exemple, l’obligation faite aux titulaires d’un permis d’exploitation de grande mine d’alimenter un compte séquestre pendant les opérations afin de garantir la remise en état du site minier, mais aussi l’obligation de publier le plan de fermeture et de réhabilitation de chaque mine sur le site internet de la compagnie minière et du Ministère chargé des Mines.
Enfin, concernant le régime fiscal, si la stabilité continue d’être garantie par le nouveau code minier, ce dernier limite désormais toutefois son bénéfice pour les détenteurs de permis d’exploitation de grande mine à la seule « période initiale de validité de son titre », soit à une durée maximum de 10 ans (a contrario, pour le permis de recherche, la stabilité du régime fiscal est garantie pendant la période de validité initiale du titre ainsi que pendant ses périodes de renouvellement).
« Le nouveau code réduit par ailleurs un certain nombre d’avantages fiscaux accordés aux titulaires de permis miniers.»
Le nouveau code réduit par ailleurs un certain nombre d’avantages fiscaux accordés aux titulaires de permis miniers, dont (1) la suppression pour les détenteurs de permis d’exploitation de l’exonération de la TVA pendant les trois premières années, à compter de la date de démarrage de la production et (2) la limitation de la période de réduction de 25% de l’impôt sur les sociétés, passant de 15 ans à 3 ans, suivant la date de démarrage de la production.
AE : Dans quelle mesure cette réforme peut-elle être mise en relation avec la vague de révisions des codes miniers actuellement en cours sur le continent africain ?
CB : Avec ce nouveau texte, le gouvernement malien semble s’inscrire dans un double processus de révision des codes miniers africains qui est à la fois sous-régional et continental. Sous-régional, car le nouveau code minier malien reprend un certain nombre de dispositions prévues par le code minier communautaire de l’UEMOA (Règlement n°18/2003/CM/UEMOA du 23 décembre 2003) auquel il fait d’ailleurs expressément référence. Continental ensuite, car le texte reprend plusieurs des recommandations émises dans la «Vision africaine des mines» adoptée par l’Union africaine en 2009, concernant notamment le renforcement des liens entre l’industrie minière et les communautés locales, et ce, afin de permettre une meilleure contribution de l’or au développement économique du pays.

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