Il est bien connu en Afrique, les pouvoirs se servent des chiffres pour défendre un bilan aux antipodes de la réalité, bombant ainsi le torse à chaque sortie médiatique avec beaucoup de démagogie sans pareille égale. Une vraie insulte au peuple. Le grand pays de l’Afrique de l’Ouest aux 1.241.238 Km2 n’échappe pas cette pratique malicieuse. Tout le Sahel est unanime que la campagne agricole précédente n’a pas été une réussite due à l’arrêt précoce des pluies. Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a alerté sur cette situation depuis le début de l’année et de nombreux experts concordent pour dire que dans notre pays, plus de 4 millions de Maliens seront en insécurité alimentaire, soit plus de 20% de la population !
Niant ces réalités et en dépit du bon sens, notre Gouvernement vient de publier des chiffres qui donnent le vertige. Ainsi, nous battons tous les records de production avec plus de 9 millions de tonnes ! Selon les mêmes autorités, la campagne agricole 2016-2017 avait déjà atteint 8,8 millions de tonnes. Comme si nous devons toujours faire plus pour montrer l’efficacité de l’action des autorités. On peut manipuler les chiffres mais on ne peut changer les réalités vécues par les populations. C’est ce désaveu cinglant qu’inflige le quotidien des Maliens aux informations fournies par le Gouvernement. De Yelimane à Inekar, de Taoudenit à TIimissa, partout les hommes et le bétail souffrent. Parcourez le pays et vous entendrez les supplications de nos compatriotes jusqu’aux portes de Bamako ! ils ont faim et ne savent plus à quel Saint se vouer.
De manière plus concrète et précise, si les chiffres du gouvernement étaient réels, comment expliquer alors l’envolée extraordinaire des prix ? Les prix relevés à Dioïla, Massigui et Béléko, (Région de Koulikoro) et Siramana, Dandereso (Région de Sikasso) sont tous à la hausse par rapport aux années précédentes. passé. Ces zones sont de véritables bassins de production de céréales et donc des points d’équilibre en termes d’accessibilité à la fois physique et économique aux céréales pour les populations des autres régions. Elles (zones) ils illustrent l’état du marché. Nous savons également que le riz local est pratiquement indisponible en raison de la faible production des zones Office riz de Mopti, Ségou, Baguineda et Sélingué. Ces réalités de terrain sont incontestables.
Les derniers pris obtenus par l’Office des Produits Agricoles du Mali (OPAM) pour la reconstitution du stock national de sécurité illustrent la flambée des cours. Ces prix sont en moyenne de 166 FCFA le kilo au mois de mai contre 150 FCFA au même moment l’année dernière. Le gouvernement dit pourtant qu’on a produit plus cette année que par rapport à l’année dernière. Comment cela est-il possible ? Les prix obtenus cette année par l’OPAM sont même les plus élevés depuis 1984, année de grande sècheresse que tout le monde a en mémoire. Nous entrons en période de soudure, pouvons – nous imaginer à quel niveau les prix seront dans deux mois, au plus fort de cette période et au moment où les populations auront des besoins les plus élevés ?
Les autorités doivent prendre conscience de la situation alarmante de nos compatriotes. N’attendons pas de voir les Maliens mourir de faim ou de migrer par milliers pour des raisons alimentaires pour réagir ! Voyons la réalité en face et arrêtons de nous mentir et de mentir aux autres car cela est ridiculement contredit par les faits qui sont têtus comme on le sait. Évitons surtout d’intervenir avec parcimonie et de manière politique en secourant ici ou là et en laissant de côté d’autres !
De manière urgente, le Gouvernement doit allouer des ressources financières appropriées à l’augmentation significative du stock de sécurité comme l’a demandé le Commissariat à la Sécurité Alimentaire (CSA). Ce qui permettra à ce service d’être plus présent dans ses interventions en distribuant gratuitement des denrées ou en les vendant à prix modéré afin que nos compatriotes puissent sortir du piège de la faim. S’il le faut, le Gouvernement doit réaffecter à cette action les ressources du Programme Présidentiel d’Urgence Sociale. En ce moment, il ne peut y avoir plus urgent pour les Maliens que de manger !
Moussa MARA
Daouda Bakary KONE
Par croissanceafrique.com
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