Le sort du terminal de Doraleh (DCT) intéresse américains et chinois.
Éjecté du terminal de Doraleh le 22 février 2018, DP World mène depuis lors trois offensives sous les regards intéressés de Pékin et Washington.
D’abord une manœuvre judiciaire auprès des tribunaux de Londres au motif d’expropriation illégale. La procédure d’arbitrage ira jusqu’au bout, l’opérateur portuaire ayant écarté toute possibilité de règlement en dehors de la juridiction londonienne. DP World a remporté la concession de 1,6 TEU en 2006 mais entretient un litige avec son partenaire depuis 2012. Le tribunal d’arbitrage de Londres s’était déjà prononcé l’année dernière, disculpant la société Dubaïote de toute mauvaise exécution de son contrat en réponse aux allégations de Djibouti sur le non respect du cahier des charges.
S’il se dit confiant sur ce premier front, DP Word n’en a pas moins ouvert un second front qui lui garantirait de maintenir sa présence sur une zone capitale. Le point nodal de cet axe est le
port de Berbera, à travers un investissement annoncé de 442 millions de dollars dans une concession de terminal portuaire qu’il contrôle à 51% aux côtés de l’Etat de Somaliland (30%) et de l’Ethiopie (19%). Une entité sera créée pour gérer les intérêts des trois partenaires.
Pays enclavé, l’Ethiopie s’engage à construire 260 km pour relier ce futur terminal à sa frontière la plus proche. Addis Abeba réduit ainsi une forte dépendance vis-à-vis de Djibouti.
L’autre axe de cette contre -offensive de DP World est médiatique. Une immense campagne de communication est conduite sous fond d’un rapport du cabinet Allan & Associates et d’une étude du cabinet Exx Africa, qui relativisent le miracle de Djibouti.
Loin de baisser les bras, l’Etat de Djibouti mène la riposte lui aussi sur plusieurs fronts. Sur la partie portuaire, le plus urgent serait de trouver un partenaire fiable pour reprendre la place laissée vacante par l’opérateur Emirati. Si le français CMA-CGM a des vues, rien n’indique que cette expression d’intérêt aura une suite. Cela d’autant que les autorités de Somaliland disent négocier aussi avec l’armateur français dans un projet de terminal de 660 millions de dollars.
En attendant un nouveau partenaire pour le terminal DCT, Djibouti peut se réjouir de l’annonce du singapourien Pacific International Lines (PIL) d’augmenter d’un tiers son trafic de transbordement sur le terminal disputé.
Ces transactions portuaires sur la corne de l’Afrique sont suivies de près par Washington et Pékin, deux puissances qui cherchent à prendre le contrôle du détroit de Bab El Mandeb, quatrième voie mondiale de transit du pétrole,
reliant la Mer Rouge et le Golfe d’Aden, situé non loin de la base américaine du Camp Lemonnier, la plus grande en Afrique (4 000 hommes ) forcée cependant de cohabiter avec une présence chinoise effective depuis 2014.
Puissance montante de la région, la
Chine pèse sur la géopolitique locale
pour avoir investi 4 milliards de dollars dans le chemin de fer reliant Djibouti à l’Ethiopie. Quelque 70% du prêt «amical » ayant servi à la réalisation de cette infrastructure provient d’Eximbank Chine qui agit dans le cadre du projet de la nouvelle route de la soie sensée relier les usines chinoises aux sources d’approvisionnement en énergie et aux marchés porteurs.
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