(N° 6 SERIE)-CHEIKH AHMADOU BAMBA UN TRÉSOR MONDIAL CACHÉ: LES MOURIDES, BIENFAITEURS SILENCIEUX DE L’HUMANITÉ : DES ACTES DE SOLIDARITÉ QUI DÉPASSENT LES FRONTIÈRES

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(CROISSANCE AFRIQUE)-L’Europe aide l’Afrique, dit-on. Mais sait-on que Cheikh Ahmadou Bamba est venu en aide à une France nécessiteuse dans les années 1900 ?

Dans les manuels d’économie occidentale, la solidarité est souvent perçue comme une perte d’efficience économique. Elle serait, selon ces courants, source de gaspillage, d’assistanat, ou de déresponsabilisation. Pourtant, à travers l’histoire de la communauté mouride, une autre vérité s’impose : celle d’une solidarité féconde, source de dignité, de prospérité partagée, et de puissance collective.

Cheikh Ahmadou Bamba a érigé la solidarité comme pilier de l’élévation spirituelle, mais aussi comme mécanisme puissant d’organisation sociale. À rebours des logiques de profit immédiat, il a instauré un modèle dans lequel donner est un acte d’adoration, et où partager ne diminue jamais celui qui donne. Ce modèle, expérimenté depuis le 19e siècle, préfigure les formes modernes de financement participatif, souvent appelées aujourd’hui « crowdfunding » et attribuées à des pays comme le Canada. Or, Cheikh Ahmadou Bamba avait déjà institutionnalisé cette dynamique bien avant 1927, en collectant des ressources en nature ou en espèces auprès de ses disciples pour financer ses projets éducatifs, agricoles et spirituels.

UNE SOLIDARITÉ HISTORIQUE

Cette impressionnante capacité de mobilisation volontaire s’est manifestée à maintes reprises dans l’histoire de la communauté :

En mai 1909, Cheikh Ahmadou Bamba remit 550 Francs aux autorités coloniales pour la construction d’une infirmerie à Diourbel.

Lors de la campagne pour le relèvement du Franc en France organisé avant 1927, les mourides contribuèrent à hauteur de 500 000 Francs, soit près d’un sixième des contributions totales de la colonie du Sénégal.

En 1992, après l’accident d’ammoniac de la SONACOS (Société nationale de commercialisation des oléagineux du Sénégal), 10 millions de FCFA furent remis aux victimes.

En 2006, 10 milliards de FCFA furent remis au président Abdoulaye Wade pour entamer les grands chantiers d’infrastructures à Touba.

Aussi, en réponse aux inondations, 1 milliard de FCFA fut remis à l’État du Sénégal.

En 2020, face à la pandémie du COVID-19, 200 millions de FCFA furent versés par les mourides à l’État du Sénégal.

Au-delà de ces montants, le caractère volontaire, discret et désintéressé de ces dons frappe les esprits. Ils ne sont pas assortis de revendications, de contreparties, ou de publicité. Ils traduisent un attachement profond à l’intérêt général, une vision noble du service à la communauté.

UNE SOLIDARITÉ SANS FRONTIÈRES

Contrairement à ce que pensent certains, la générosité mouride ne se limite pas au Sénégal. Elle s’est aussi exprimée en plus de l’exemple français en Turquie et au Maroc, où les mourides ont contribué aux efforts post-séismes à hauteur de 200 millions de franc CFA au total.

Et plus largement, cette solidarité est visible dans toute la diaspora, par des transferts massifs, discrets, mais constants, au service de projets éducatifs, sanitaires et religieux dans leur pays d’origine et ailleurs.

La force de cette solidarité est telle qu’au cours de certaines opérations de collecte, les contributions en espèces atteignent plusieurs milliards de francs CFA, jusqu’à ce que le Khalife dise : « Cela suffit, l’objectif est atteint. »

UNE SOLIDARITÉ ENTRE DISCIPLES SILENCIEUSE MAIS CONSTANTE

Cette solidarité n’est pas seulement verticale (de la base vers les responsables), elle est aussi horizontale, entre membres de la communauté. La ville de Touba, l’une des plus dynamiques du continent africain, accueille chaque année des milliers de nouveaux arrivants, souvent sans emploi ni ressources. Par foi, ils s’installent dans cette cité bénie. Et par solidarité, ils sont pris en charge spontanément par d’autres disciples.

Ils bénéficient d’un hébergement provisoire, de repas partagés, de vêtements, de soins. Les dons volontaires de la diaspora participent aussi à cette prise en charge, renforçant les liens invisibles mais puissants qui unissent les membres de la communauté, même à des milliers de kilomètres.

Le troisième Khalife général, Serigne Abdoul Ahad Mbacké, symbolisa cette hospitalité lorsqu’il hébergea dans sa propre maison de nombreux disciples indigents venus de loin avec leurs familles, leur fournissant nourriture quotidienne et satisfaction des besoins primaires.

UNE VISION SPIRITUELLE DE L’ÉCONOMIE

Ce modèle de solidarité s’inscrit dans une philosophie économique alternative, où le partage est vu comme un multiplicateur de richesse, et non comme une perte. Le verset 261 de la sourate 2 du Coran l’exprime clairement :

« Ceux qui dépensent leurs biens dans le sentier de Dieu ressemblent à un grain d’où naissent sept épis, à cent grains l’épi. Car Dieu multiplie la récompense à qui Il veut.»

Dans le modèle de Cheikh Ahmadou Bamba, la solidarité désintéressée remplace l’épargne spéculative, réduit l’individualisme, et régule les inégalités. L’épargne y existe, mais comme moyen d’investissement utile, jamais comme instrument de domination.

UNE CITÉ SAINTE

Cette solidarité s’étend enfin à la protection morale et spirituelle de la cité :
À Touba, l’alcool, le tabac, les jeux de hasard sont interdits malgré le fait que Touba appartienne à un pays laïque

L’environnement est encadré pour préserver la pureté morale des habitants, condition essentielle à une société solidaire et apaisée.

Magaye GAYE
Économiste international
Ancien Cadre de la Banque ouest africaine de développement BOAD

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Croissance Afrique (sarl) est un Média multi-support qui propose plusieurs rubriques axées sur l’actualité économique du continent. Le magazine est un journal (en ligne dont un mensuel disponible dans les kiosques à journaux) qui traite spécialement les informations financières dédiées à l’Afrique. Il est également le premier média malien spécialisé dans la production d’Informations Économiques, financières, Stratégiques, et orienté vers le reste du monde. Le Magazine a été fondé en Novembre 2017 à Bamako.

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