(CROISSANCE AFRIQUE)-Au Sénégal, dans le cadre de leur politique visant à renforcer le redressement économique et à stabiliser les finances nationales, les autorités viennent de dévoiler une série de réformes fiscales majeures qui ont des implications considérables pour le secteur du mobile money.
Ainsi, ces nouvelles mesures réglementaires, qui affectent directement les opérations telles que les transferts d’argent ainsi que les retraits, pourraient profondément redéfinir le domaine financier numérique du pays, en introduisant des modifications susceptibles de transformer la manière dont les individus et les entreprises interagissent avec les services bancaires mobiles.
Désormais, il est établi que chaque transaction, peu importe sa nature, effectuée par le biais des services de transfert d’argent, est soumise à une nouvelle imposition de 0,5% de taxe. De manière similaire, cette taxe est également imposée sur les paiements marchands que les clients réalisent au quotidien. En plus, les commerçants doivent, de leur côté, consentir au paiement d’une taxe supplémentaire, fixée à 1% sur les montants qu’ils reçoivent, ce qui pourrait exercer une pression économique sur leurs activités commerciales, nécessitant une éventuelle adaptation de leurs stratégies de vente et de gestion financière. Ces réformes font partie d’une initiative plus vaste pour moderniser et rendre plus durable le cadre économique du Sénégal, en s’adaptant aux exigences d’un monde de plus en plus centré sur les technologies digitales.
La double imposition actuelle suscite de nombreuses interrogations et préoccupations quant à ses répercussions, à la fois économiques et sociales, sur les différents acteurs concernés. Pour les utilisateurs, cette mesure fiscale représente une hausse non négligeable du coût des opérations financières, un élément particulièrement problématique pour ceux qui dépendent du mobile money au quotidien pour faciliter leurs transactions personnelles et professionnelles.
En effet, cette augmentation risque de compliquer l’accès aux services économiques et financiers pour les personnes déjà vulnérables ou pour les petites entreprises en quête de stabilité. Quant aux commerçants, la taxe supplémentaire introduite pourrait constituer un frein significatif à l’usage des paiements numériques, les incitant à privilégier les transactions en espèces. Cette tendance, si elle se confirmait, irait à l’encontre des efforts de digitalisation de l’économie menés par le gouvernement et pourrait ralentir la transition vers une économie moderne et connectée, créant ainsi un paradoxe dans les méthodes encouragées par les autorités.
Le gouvernement, dans son approche de réforme fiscale, ne s’est pas limité uniquement aux flux numériques. Dorénavant, tout retrait d’un montant supérieur à 20 000 FCFA effectué en une journée est assujetti à une taxation de 0,5%. Bien que cette mesure ait été mise en place principalement pour cibler et encadrer les opérations de grande ampleur et de forte intensité, elle risque fort de créer des répercussions nuisibles pour les petites entreprises ainsi que pour les particuliers, qui se retrouvent à devoir assumer des frais supplémentaires pour obtenir des liquidités essentielles à leurs activités opérationnelles quotidiennes ou à financer leurs dépenses courantes. En conséquence, cette politique pourrait modifier les habitudes de consommation et de gestion des finances, imposant des ajustements délicats face à des exigences économiques et une pression financière accrues.
Aussi, ces nouvelles taxes représentent un changement significatif dans la stratégie économique de l’État, qui s’efforce d’élargir son assiette fiscale tout en cherchant à maximiser ses recettes. Cette politique fiscale ambitieuse, bien que destinée à augmenter les fonds publics, pourrait potentiellement menacer le développement du mobile money, surtout dans les zones rurales défavorisées où les services bancaires traditionnels demeurent rares et sont souvent considérés comme inaccessibles.
Notons que la croissance rapide du mobile money a été un moteur essentiel d’amélioration économique, mais une imposition trop sévère pourrait avoir l’effet inverse en incitant les individus à revenir vers des pratiques de paiement informelles, principalement basées sur les échanges en espèces. Une telle évolution compliquerait non seulement le suivi précis des flux financiers, mais affaiblirait également les systèmes de régulation fiscal et économique qui dépendent de données transparentes et fiables.
Face à ces réformes fiscales, un débat crucial s’ouvre, portant sur la manière de trouver un équilibre entre la nécessité de renforcer les ressources financières de l’État et la préservation d’un climat économique dynamique, propice à l’innovation ainsi qu’à l’inclusion financière. Le secteur du mobile money, qui a été un acteur majeur de la modernisation de l’économie sénégalaise, est actuellement confronté à une envergure de défis et à des choix stratégiques primordiaux qui pourraient déterminer son avenir.
Mariam KONE