La démocratie n’est pas uniquement un principe politique ; elle est aussi une exigence d’équilibre sociétal, d’équité et de reconnaissance de la dignité humaine sous toutes ses formes.
Dans ce sens, la représentation des peuples et des cultures dans les plus hautes sphères du pouvoir — qu’il soit temporel ou spirituel — est un enjeu fondamental.
Le Saint-Siège, bien qu’institution religieuse, est aussi un État. Il entretient des relations internationales, influence les débats mondiaux, prend des positions sur des questions cruciales. À ce titre, il est redevable des mêmes exigences de justice et de représentativité que tout autre État de la planète.
C’est en tant que citoyen du monde que je m’autorise cette réflexion. Je n’ai pas vocation à intervenir dans les affaires doctrinales, mais je m’intéresse à la dimension géopolitique, institutionnelle et symbolique du Vatican.
Et je me permets de poser une question : comment expliquer qu’aucun Africain n’ait jamais accédé à la papauté ? Est-ce un simple concours de circonstances ou le reflet d’un inconscient collectif mondial qui n’est pas encore prêt à admettre une figure noire à la tête d’une telle institution ?
Dans ce débat, on parle beaucoup de l’Afrique, mais trop souvent de l’Afrique électrice, rarement de l’Afrique élue — comme si les Africains avaient vocation à voter pour les autres, mais jamais à être choisis eux-mêmes.
L’Afrique est aujourd’hui un bastion mondial de la foi.
Contrairement à bien des régions où la spiritualité est reléguée au second plan par le matérialisme ou le modernisme, l’Afrique continue de porter haut les couleurs du monothéisme. Qu’il s’agisse du christianisme ou de l’islam, le religieux structure profondément la société, l’éducation, la morale et la culture.
Sur les grandes questions sociétales actuelles, l’Afrique s’est aussi illustrée par sa clarté.
Dans les débats récents sur l’homosexualité, les mouvements LGBT ou la redéfinition du couple, de nombreuses voix africaines – chrétiennes, musulmanes ou simplement attachées à la tradition – se sont élevées pour défendre les repères fondamentaux de leurs civilisations.
Dignement. Fermement. Sereinement. L’Afrique ne suit pas le monde, elle ose encore dire non. Et cela, dans un monde en perte de repères, est une force.
Alors pourquoi ne pas considérer aujourd’hui un pape africain ?
Ce ne serait ni une faveur ni un privilège, mais un acte de reconnaissance.
Reconnaissance d’un continent debout dans sa foi. Reconnaissance d’une terre où la religion n’est pas accessoire.
Reconnaissance d’un peuple prêt à assumer des responsabilités globales, y compris spirituelles.
L’Afrique ne demande pas, elle mérite. Et le monde a tout à gagner à l’écouter.
Magaye GAYE
Économiste international