Dans un contexte où le cours du baril de Brent avoisine les 60 dollars, il est essentiel d’analyser l’impact de cette conjoncture sur les économies africaines, en particulier celles qui ne sont pas des exportatrices majeures de pétrole, comme le Sénégal.
Cette baisse constitue, à bien des égards, une véritable opportunité. Elle est de nature à allèger le poids des subventions énergétiques, souvent lourdes pour les budgets nationaux, et offre potentiellement une bouffée d’oxygène aux consommateurs, notamment en ce qui concerne les prix du carburant. Pourtant, les rapports produits par certaines institutions internationales, comme celles issues de Bretton Woods, peinent à s’adapter à cette évolution. Ils restent figés dans des logiques de diagnostic centré sur les subventions, sans intégrer les effets bénéfiques de la conjoncture actuelle.
Il est temps que ces organismes actualisent leurs cadres d’analyse, car leur autorité en matière de conseil économique pourrait être fragilisée si elle apparaît déconnectée des réalités économiques actuelles.
L’évolution favorable des prix internationaux des matières premières devrait au contraire être perçue comme une opportunité pour accompagner les États africains vers une meilleure organisation budgétaire et une réduction maîtrisée des subventions.
Par ailleurs, les régimes africains qui ont su renouer avec la volonté populaire ont aujourd’hui l’occasion de prendre en main la gestion des importations de biens essentiels : riz, sucre, denrées de première nécessité. Cela implique l’achat en gros à l’importation et la revente aux importateurs traditionnels, afin de mieux maîtriser les cours et éviter les spéculations excessives sur les marchés intérieurs.
Il convient également de mettre désormais en place de solides systèmes de péréquation, notamment au plan énergétique, afin de mieux gérer le fardeau des subventions et d’assurer une stabilité des prix de l’énergie pour les populations et les secteurs productifs.
Devant les nombreuses et coûteuses importations d’engrais et de biens de première nécessité, il devient impératif de s’interroger sur l’efficacité de commissions régionales telles que l’UEMOA ou la CEDEAO, censées porter le projet d’intégration économique. Où passent les énormes droits et taxes perçus auprès des États, supposément destinés à renforcer l’intégration ? Qu’en est-il réellement du Fonds d’aide à l’intégration regional de l’UEMOA ?
Plus de 60 ans après les indépendances, est-il normal que des pays africains, pourtant gâtés par la nature en eau, en soleil et en terres fertiles, continuent de dépendre massivement d’importations pour des produits de première nécessité ? Quelques unités d’intégration économique régionales auraient déjà dû permettre l’émergence d’industries de transformation et d’unités de production d’engrais, mais aussi la mise en place de systèmes de renforcement des marchés et des bourses régionales de matières premières.
Les économies africaines, bien qu’encore vulnérables, commencent à développer des stratégies d’adaptation aux fluctuations mondiales. Certains pays, comme le Rwanda ou l’Éthiopie, ont amorcé des réformes leur permettant de mieux faire face aux crises externes. Toutefois, il reste encore des efforts considérables à fournir pour bâtir une résilience à grande échelle, réduire les dépendances structurelles et poser les bases d’une souveraineté économique durable.
Magaye GAYE